Après une année 2019 très positive pour l’activité bancaire dans les deux départements, 2020 avait plutôt bien commencé. Mais le secteur va devoir aider ses clients à surmonter la crise du coronavirus.

En Savoie Mont Blanc, l’activité a été très soutenue en 2019, et les crédits ont progressé pour les particuliers, comme pour les entreprises. Le montant global des crédits a atteint 12,5 milliards d’euros en Savoie et 35,6 en Haute-Savoie. « Les banques ont joué leur rôle de financement de l’économie, souligne Pascal Cotton, président du comité des banques de Haute-Savoie, et les entreprises ont un niveau élevé d’accès au crédit : 97 % pour les crédits d’équipement et 89 % pour les crédits de trésorerie. »
Même satisfecit en Savoie où le président du comité des banques, Olivier Mirande, pointe l’excellente santé du tourisme et ses investissements. Les deux responsables sont aussi très satisfaits des niveaux de crédit des particuliers. Ce dynamisme est d’autant plus notable que les banques sont contraintes depuis maintenant plusieurs années aux taux d’intérêt très bas qui rognent leurs marges, alors que le secteur est déjà bouleversé par la digitalisation. « Et à cela s’est ajouté en 2019 l’impact des engagements pris après le mouvement des Gilets jaunes » observe Pascal Cotton.
Gel des tarifs, plafonnement des frais et offres spécifiques pour les plus fragiles ont pesé sur les résultats. Le volume des crédits compense un peu cette baisse de marges, mais surtout, les banques font profondément évoluer leur modèle. Depuis 2011, les effectifs se réduisent d’environ 1 % par an, mais en ne remplaçant pas les départs en retraite. Et les métiers se transforment profondément. Une adaptation qui a permis jusqu’ici aux banques de continuer à se développer.

Un choc mondial
Mais en ce printemps 2020, le choc sanitaire mondial du coronavirus et ses premières conséquences dévastatrices sur l’économie provoquent une crise majeure. « Heureusement pour le tourisme l’essentiel de la saison avait déjà été réalisé avant la fermeture des stations le 15 mars » observe Olivier Mirande. Mais comme Pascal Cotton il s’attend à une période extrêmement compliquée. « Nous serons aux côtés de nos clients pour les aider à surmonter cette crise » assurent-ils « mais il est bien trop tôt pour en mesurer toute l’ampleur.»

Toujours plus de concentrations
Sur les vingt dernières années, l’activité bancaire a été très soutenue en Savoie Mont Blanc en lien logique avec le dynamisme économique des deux départements. Et si certaines années ont été moins florissantes, globalement, l’ensemble des établissements s’est toujours développé, porté notamment par la croissance ininterrompue du marché du crédit immobilier. Malgré la crise de 2008-2009, marquée d’ailleurs par un soutien sans faille du monde bancaire à l’industrie et au décolletage, les crédits aux entreprises ont aussi plutôt gonflé sur l’ensemble de la période et ce d’autant que l’économie locale a l’avantage d’être diversifiée entre tourisme, industrie, services et BTP. Pour autant, les banques de Savoie Mont Blanc n’ont pas échappé aux transformations profondes de l’économie et notamment à l’impact de la révolution digitale, et à la concurrence des établissements en ligne après celle des nouveaux acteurs dans la banque qu’ont été la Poste et les assurances.

Regroupements et fusions

Le modèle économique des banques s’est transformé, le nombre d’agences physiques est plutôt en réduction, les métiers évoluent avec de plus en plus de conseil à forte valeur ajoutée et des recrutements sur des postes de plus en plus qualifiés. La plupart des enseignes ont diversifié leurs activités à l’instar du Crédit agricole qui a ajouté l’immobilier à sa palette avec Square Habitat ou du Crédit mutuel avec la téléphonie. Surtout, la période a été marquée par un mouvement de concentration important parmi les acteurs locaux. La Banque populaire savoisienne basée à la Roche-sur-Foron a ainsi fusionné avec la Banque populaire des Alpes, déplaçant alors son siège à Grenoble en 2001 avant de partir pour Lyon en 2016 (photo) à l’occasion d’une nouvelle fusion avec les caisses du Massif central et de Loire et Lyonnais. Et la Banque de Savoie a rejoint la Banque populaire des Alpes en 2008. En 2005, c’est le Crédit mutuel Savoie Mont Blanc qui rejoint la Fédération centre est. Enfin en 2007, la Caisse d’épargne Alpes a fusionné avec celle du Rhône et a vu elle aussi son siège transféré à Lyon. Depuis quelques années, les banques continuent de voir leur activité progresser, mais leurs marges s’érodent du fait principalement de la faiblesse des taux d’intérêt.
Analyse / Pascal Cotton, Président du Comité des banques 74
« LA MONTÉE EN COMPÉTENCES EST ESSENTIELLE »

« La digitalisation fait évoluer profondément nos métiers. Un exemple : en 2010, 52 % de nos clients passaient au moins une fois par mois dans leur agence. Aujourd’hui cela n’en concerne plus que 20 %. Et après les réseaux sociaux, ce sont les applis bancaires que nos clients utilisent le plus sur leurs mobiles. Dans ce contexte, nous devons nous adapter et nous transformer. Dans nos recrutements tout d’abord ; nous continuons d’embaucher énormément de jeunes mais nous recourons de plus en plus à l’alternance et pour des profils de poste à bac +3, bac +4 et bac +5. Et nous travaillons d’ailleurs très étroitement avec les écoles locales et l’Université de Savoie Mont Blanc. Nous devons aussi faire évoluer nos personnels par le biais de la formation continue. C’est d’ailleurs un outil que la banque utilise depuis très longtemps et nous y consacrons 4,4 % de notre masse salariale (derniers chiffres nationaux), quand la moyenne des entreprises françaises est à seulement 2,7 %. Ces parcours de formation accompagnent la montée en gamme de nos services qui doivent être de plus en plus pointus pour répondre aux besoins de nos clients. »
Prospective / Olivier Mirande, Président du Comité des banques 73
« LA BANQUE VA DEVOIR SE RÉINVENTER »

« Il nous faut monter en expertise. Cela passe par des diversifications d’activités sur des produits à plus forte valeur ajoutée. Nous devons aussi nous développer sur de nouveaux marchés comme celui du financement de la transition énergétique et de l’économie verte. C’est un marché à fort potentiel en Savoie avec l’énergie solaire et la présence de l’Ines sur Savoie Technolac ou encore l’hydroélectricité avec le CIH et le potentiel hydroélectrique du département. Nous investirons aussi dans des foncières, des structures de capital risque ou encore de capital développement. Ces activités à forte valeur ajoutée vont certes consommer des fonds propres mais elles vont aussi rapporter davantage de commissions. Nous devons nous réinventer, chercher de nouveaux leviers de croissance, sans pour autant abandonner les secteurs que nous avons déjà investis comme la téléphonie ou la présence dans l’immobilier. Il ne faut rien s’interdire et être innovant. C’est surtout valable pour l’activité retail parce que sur l’activité entreprise, la banque a déjà hissé son niveau d’expertise ce qui génère davantage de revenus. »
Par Sophie Guillaud
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