La dernière fois que j’ai aidé un ami, j’ai eu l’agréable surprise de me voir offrir une bonne bouteille de rhum. Cela prouve bien sûr qu’il connait mes goûts et mes faiblesses, car sans abuser de cette boisson ni même vouloir en faire la promotion, je ne peux qu’avouer apprécier d’en partager la saveur entre connaisseurs, lors de moments privilégiés de convivialité. Ce petit cadeau m’a fait d’autant plus plaisir que je n’attendais évidemment rien en retour de mon aide.
Pourtant, à l’heure où presque tout semble avoir un prix, où l’argent apparaît comme la seule valeur universelle, même l’amitié semble pouvoir être monnayée. A en juger par les pratiques de certains milieux, la fidélité pourrait même parfois atteindre des montants confortables.
Prenons l’exemple de la politique, où il est de tradition, à l’approche des élections, de chercher à recaser ses « amis ». Comme le souligne nos confrères du Monde, l’entourage de l’actuel président profite très largement de sa générosité puisque ce ne sont « pas moins de 57 membres de cabinets ministériels et à la présidence de la République qui ont cessé leurs fonctions » depuis le 1er juin dernier, pour être le plus souvent redirigés vers des fonctions de hauts fonctionnaires, au statut protégé et à la rémunération éloquente.
France 3 aussi s’est intéressé à la question, dans son magazine « Pièces à conviction », confirmant par ce biais que, si la voie d’accès royale à la haute fonction publique reste encore l’ENA (principe, lui aussi, de plus en plus contesté), le copinage représenterait cependant près d’une nomination sur cinq. Nul besoin alors de compétences spécifiques pour acquérir le statut de préfet hors-cadre ou de conseiller d’Etat, grâce à ce privilège largement utilisé par les différents gouvernements successifs. Sans compter qu’à ce principe, viennent également se rajouter les créations de commissions et autres commandes de rapports grassement rémunérés, histoire de s’assurer quelques amitiés supplémentaires…
Une des différences avec ma bouteille de rhum, hormis le prix du cadeau, réside notamment dans le fait que cette « récompense » est ici payée avec l’argent des autres. Ainsi, lorsque mon ami ouvre son portefeuille, la République quant à elle se contente de piocher dans le budget de l’Etat, pour lequel chacun de nous est largement mis à contribution…
En incluant cette donnée, les caractéristiques de notre pays pourraient donc être résumées par une désindustrialisation toujours grandissante, symbolisée actuellement par la fermeture du site Alstom de Belfort, une sécurité intérieure mise en défaut par le risque d’attentats, un effritement de la croyance en l’unité européenne, une reprise de l’emploi toujours en attente, et un pouvoir politique en complète rupture avec la réalité de ses administrés.
On connaît donc les grands thèmes des prochaines élections présidentielles. Mais plutôt que de grands discours, de listes d’idées issues de brainstorming, d’éléments de langages correspondant à un positionnement marketing et d’attaques systématiques de l’opposition, nous serions prêts à nous contenter d’exemplarité.
Malheureusement, les pratiques en vigueur, héritées de la monarchie, nous montrent que les intérêts individuels prennent encore trop souvent le pas !
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