Nicolas Daragon «Faire de la région un modèle de performance»

par | 10 juin 2018

Le vice-président délégué au tourisme et au thermalisme d’Auvergne-Rhône-Alpes affiche de vraies ambitions, nouvelle stratégie à la clé, et entend hisser la région dans le top 5 des destinations européennes.

Auvergne-Rhône-Alpes figure dans le top 3 des destinations touristiques françaises. Quels sont les grands chiffres à retenir?

Le tourisme est une filière de premier plan en Auvergne-Rhône-Alpes avec près de 160000 emplois salariés, 20 milliards d’euros de consommation, soit 8% du PIB (ce qui fait d’elle la 2e région touristique française), et 180 millions de nuitées recensées chaque année. À elle seule, notre région concentre 11% des parts de marché du tourisme en France, mais aussi 1,4 milliard d’euros d’investissements. À mon sens, s’il est un chiffre à retenir, c’est celui des retombées économiques. À cet égard, les deux Savoie font figure de moteurs de cette économie, générant autant de recettes que les autres départements de la région réunis.

Fort de ce constat, et pour doper la destination, vous annoncez la mise en place d’une véritable stratégie touristique… Qu’a-t-elle d’innovant?

Sans forfanterie, le virage pris en décembre 2016 avec l’intégration du tourisme dans le schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) change véritablement la donne. Contrairement à l’ancienne mandature – et en cela il s’agit d’une vraie innovation –, la totalité des financements seront consacrés aux investissements, et non plus au fonctionnement. Notre volonté est d’accompagner les porteurs de projet et de faire en sorte que le soutien apporté par la Région soit tangible et concret. Dès à présent, chaque investissement validé sera réalisé durant le mandat de Laurent Wauquiez. Et seront soutenus les projets jugés pérennes, comme des hébergements novateurs, la digitalisation en vue de mieux vivre des expériences, de nouvelles activités type Yukon quad au Pal…

Ces aides (plafonnées à 250000 euros pour les hébergements collectifs) bénéficieront d’un effet levier auprès des banques et des collectivités. Il s’agit donc de redonner au tourisme la place qui lui est due?

Oui, désormais, le tourisme est une industrie à part entière, structurée autour de filières d’excellence, pourvoyeuses d’emplois. Avec l’objectif de faire d’Auvergne-Rhône-Alpes un modèle de performance touristique et d’innovation pour capter le potentiel de croissance d’un secteur qui pèse plus de 8% du PIB régional. Toutefois, et aux termes de la loi NOTRe, le tourisme demeure une compétence partagée. Ce qui signifie aussi que nous devons travailler en synergie avec les acteurs publics via la mise en place de conventions avec les départements et les associations départementales de tourisme, et de contrats de stations avec les intercommunnalités.

Cette stratégie repose sur trois piliers, quels sont-ils ?

Cette nouvelle politique repose effectivement sur cinq thématiques d’excellence, deux priorités transversales que sont l’hébergement et les sites emblématiques, et des destinations à forte notoriété comme Savoie Mont Blanc. Au titre des cinq thématiques d’excellence, figurent le tourisme de pleine nature, dont nous sommes la 1re région en termes d’équipements dédiés, et la diversification touristique de la montagne qui ont toutes deux fait l’objet d’appels à projets.
Sont également concernés le tourisme itinérant et grandes randonnées, qu’il soit pédestre, cyclable ou équestre. Cette pratique redevient à la mode et génère des recettes en constante augmentation, aujourd’hui estimées à 70 euros par jour. Elle attire de nouvelles clientèles, nationales et étrangères; il devient donc essentiel de structurer cette offre et de s’appuyer sur de grandes randonnées régionales (Grandes traversées des Alpes, du Massif central, du Jura…) pour favoriser notre attractivité touristique. Au global, 40 millions d’euros seront injectés pour développer 400 kilomètres de vélo routes et voies vertes, dont 50% affectés à ViaRhôna, itinéraire structurant reliant le Léman à la Méditerranée, notamment pour l’aménagement de haltes fluviales.
Autre thématique d’excellence majeure : le thermalisme et le bien-être, via le plan thermal 2016-2020 qui a accordé 23 millions d’euros à une vingtaine de stations (subventions allant de 20000 à 2,5 millions) pour que les stations thermales transforment leur offre. Exemple fort en Savoie, avec Brides-les-Bains qui vient d’ouvrir ses nouveaux thermes (un investissement de 17 millions). Aix-les-Bains et Saint-Gervais Mont-Blanc bénéficieront aussi d’une aide.

Parmi ces thématiques figurent aussi la gastronomie et l’œnotourisme… Avec quelle ambition?

Notre région est d’une incroyable richesse avec ses paysages viticoles uniques et ses nombreux chefs étoilés… 93 étoiles au total ! Un soutien est désormais apporté aux exploitations agricoles et viticoles. Un nouveau dispositif aide par exemple les vignerons à installer des caveaux de dégustation. Et le premier à en bénéficier est un vigneron savoyard, les Vins fins de Cruet.

Qu’en est-il des deux appels à projets sur la pleine nature et la montagne 4 saisons?

Le premier vise le tourisme de pleine nature. 21 territoires d’excellence ont été identifiés en Auvergne-Rhône-Alpes et se verront allouer une aide de 10 millions d’euros. Avec l’objectif de créer des spots de pratique. En Savoie Mont-Blanc, plusieurs projets vont voir le jour : un espace VTT en Haute-Maurienne et Vanoise avec l’aménagement de pistes d’enduro et de cross-country sur les sites de Termignon et Bessans ; une offre d’activités d’orientation et de parcours handisport aux Arvan Villards; un schéma directeur de développement du VTT et un pôle d’attractivité autour du canyon de l’eau rousse dans la vallée d’Aigueblanche…
Le second appel à projets, doté d’une enveloppe de 14 millions, cible la diversification touristique des territoires de montagne. 18 territoires sont concernés dans les Alpes, deux dans le Jura et trois dans le massif central. La stratégie de financement des investissements est concertée avec les territoires, en lien avec les départements, l’État et aussi l’Union européenne (18 millions de fonds Feder).

La montagne reste le pilier de l’économie touristique avec 173 stations de ski (dont 114 en Savoie Mont Blanc).

La montagne est un grand marqueur identitaire. Nous avons les Alpes dans notre nom de région, le dessin des monts dans notre logo, 3 vice-présidents dédiés à cette “cause” : Gilles Chabert, Fabrice Pannekoucke et moi-même. L’ambition de la Région est tout d’abord de réconcilier la montagne avec toutes les saisons, en considérant que l’hiver demeure un pilier central de l’économie touristique. À ce titre, le plan montagne porté par Gilles Chabert sert d’importants enjeux comme la neige (31 millions investis dans 102 projets à fin 2017), l’immobilier de loisir en faveur des centres de vacances et des logements des saisonniers, l’accessibilité des stations, mais aussi la santé et le numérique.

La diversification de la montagne s’impose donc comme un enjeu majeur ?

Beaucoup de stations sont encore trop dépendantes de la neige. Elles doivent revoir leur modèle économique en agissant sur la mobilité, les hébergements touristiques (centres de vacances, hôtellerie familiale, résidences de tourisme, immobilier diffus…), et les activités de pleine nature afin de développer le tourisme toute l’année et de favoriser l’accès au plus grand nombre. Et nous les y aiderons. Celles qui ont réussi, comme Megève et Chamonix, doivent devenir une source d’inspiration pour les autres.
Cet enjeu nécessite d’être au cœur d’un territoire environnant plus large qui ne se limite plus aux seules stations de montagne, en jouant sur les diversités et les complémentarités pour étendre les périodes d’activités. Il s’agit de proposer aux clientèles touristiques une offre structurée. Il n’y a pas une montagne mais des montagnes, pas une station mais des stations, pas une destination mais des destinations.


Par Patricia Rey


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