Gaylord Chatel, jeune diplômé de 23 ans, réside à Francin, en Savoie. Malvoyant, il se bat pour embrasser une carrière en milieu ordinaire.
Et si le véritable handicap de Gaylord Chatel était… sa combativité ? Parce que, le jeune Savoyard de 23 ans aspire à la normalité, malgré sa vue défaillante. Et cette vie ordinaire passe par l’accès à l’emploi. Sa quête d’une carrière « normale » se heurte à un vide juridique et administratif aliénant. « Ma vision est de 3 sur 10 à l’œil droit et 0,5 sur 10 à l’œil gauche. Mon état ne peut pas s’améliorer parce que ce sont les nerfs optiques qui sont atteints », déclame Gaylord Chatel comme une leçon qu’il récite à chaque nouvelle rencontre.
Et pourtant, force est d’admettre qu’il n’y paraît rien : Gaylord Chatel rend son handicap quasi… invisible. Avec ses lunettes de vue à peine teintées, il pianote à la vitesse de la lumière sur son Smartphone dont il zoome au maximum les caractères. Il ne déambule pas avec une canne et distingue son environnement dans les grandes lignes mais ne tâtonne pas en s’appuyant contre les murs et les meubles.
Pourtant, Gaylord Chatel ne parvient pas à décrocher un contrat en alternance pour le master qu’il souhaitait rejoindre dans la filière commerce. Malgré tous les obstacles qui ont jalonné sa scolarité, le jeune homme est titulaire d’un diplôme universitaire : « Les enseignants, dès l’école primaire, ne se rendaient pas bien compte de mon problème et malgré la bonne volonté de certains, la plupart des solutions mises en œuvre n’étaient pas adaptées… »
Gaylord s’accroche. Il redouble d’efforts et décroche une licence d’italien LLCER (langue et civilisation) à l’Université Savoie Mont Blanc. Mais en arrivant au carrefour de sa vie, les choses se gâtent, lorsqu’il est confronté aux réalités du marché du travail.
300 candidatures pour… 3 entretiens
Les portes se ferment les unes après les autres et les cases administratives se resserrent autour de l’énigme que représente Gaylord Chatel, ni aveugle, ni vraiment voyant : « Envisager une alternance dans une entreprise conventionnelle, c’est le parcours du combattant. Sur 300 candidatures, j’ai obtenu à peine trois entretiens… » Les rouages administratifs se grippent : interdiction de passer le permis de conduire ; sans voiture, impossible de trouver un emploi de commercial ; dépendance aux aides financières pour se déplacer… plafonnées à 12 000 € par an, une somme qui ne couvre pas les trajets domicile travail à plein temps.
« Je dois me restreindre à un emploi à mi-temps dans un périmètre proche de Francin où je suis domicilié. Au-delà, je serais obligé de payer pour travailler », résume Gaylord Chatel, qui cherche sa place dans la société. « J’ai voulu savoir si des jeunes malvoyants travaillaient dans des entreprises classiques. Il n’y en a aucun. Ils sont soit en entreprise adaptée, soit on leur propose de faire kiné », fulmine Gaylord Chatel qui continue de tenter sa chance en milieu ordinaire.
L’Allocation pour adulte handicapé lui a été refusée en mars 2024 mais le jeune homme ne s’avoue pas vaincu. Après avoir épuisé les recours amiables et civils, il place maintenant son sort entre les mains du tribunal judiciaire de Chambéry : il sera fixé après l’audience du 23 juin. Toutefois, sa combativité vient de lui offrir sa première victoire : la manière dont il relève les défis a attiré l’attention de Mathieu Janin, dirigeant fondateur de la pépinière d’entreprises SLS Actiparc à Le Cheylas (38).
« J’avais postulé chez Mathieu Janin pour un contrat en alternance mais ce n’est que plus tard qu’il m’a recontacté pour me proposer un stage, prolongé en CDD, avec, peut-être, un CDI à la clé », retrace Gaylord Chatel qui s’extasie : « Ce qui est agréable, c’est que je suis embauché pour louer des bureaux et des locaux dans un environnement où il y a une belle énergie » … Peut-être la lumière au bout du tunnel ?
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