Lancée par les architectes Blandine et Xavier Patriarche, l’agence chambérienne Kayak Architecture s’attache à introduire davantage d’écologie et de liens sociaux dans ses réalisations.
Xavier Patriarche était directeur général délégué de la prestigieuse agence Patriarche, dont l’activité a été lancée en 1960 par son père Bernard. Il s’occupait principalement du pôle “urbanisme” tandis que son épouse Blandine exerçait au sein de l’agence comme cheffe de projets. « Dès mes premiers chantiers, j’ai été impressionné par le gâchis de matériaux. Cette sensibilité m’a conduit, en particulier, à rejoindre, en 2019, le comité de pilotage de la démarche “Zéro déchet zéro gaspillage” portée par Grand Annecy, la communauté de communes de Rumilly, Grand Lac et Grand Chambéry », explique-t-il.
De plus en plus tentés par d’autres pratiques de leur métier, Blandine et Xavier Patriarche ont franchi le pas en 2019 en créant Kayak Architecture. « Parce qu’ainsi, nous sommes à bord d’une embarcation légère, après avoir quitté un gros bateau où le travail était très intéressant mais où nous pouvions aussi passer à côté de petits projets nous tenant à cœur », précisent-ils.
Construire autrement
Installée à Chambéry, l’agence se consacre à des projets économes en ressources et générateurs de liens humains. Des pièces urbaines dont la taille n’est pas suffisante pour attirer les promoteurs. La reconversion de l’ancien hôtel Bon Accueil en centre d’hébergement d’urgence de 108 places, à Chambéry, illustre parfaitement sa démarche. Réalisée sous une maîtrise d’ouvrage de Cristal Habitat, l’opération porte sur la rénovation thermique, la mise en accessibilité et la transformation du bâtiment constitué d’un rez-de-chaussée et de deux niveaux de chambres. La réhabilitation intérieure et extérieure a été pensée de manière à conserver la charpente et la couverture d’origine. Elle favorise aussi le réemploi d’éléments déjà en place et l’utilisation de matériaux biosourcés (ouate de cellulose, menuiseries bois, isolation par l’extérieur…).
Dans le secteur de Mérande, à Chambéry toujours, Kayak intervient sur Les Petits Paliers. Porté par le promoteur chambérien Au Bercail, expert dans les petits groupes d’habitat « favorisant le bon voisinage et la convivialité », ce programme de cinq logements associe énergies renouvelables, matériaux biosourcés, principes bioclimatiques, économie circulaire. « Il prend place sur une ancienne bâtisse que nous souhaitions au départ conserver mais cela n’était techniquement pas possible. En revanche, la mémoire du lieu sera préservée au travers du mur de clôture et des anciennes fondations de pierre », détaille Xavier Patriarche.
Kayak est attachée à une architecture qui n’artificialise pas de terrains vierges et démolit le moins possible. « Tenir compte de l’existant permet de contextualiser davantage et d’aboutir à des aménagements originaux », poursuit son dirigeant.
Valoriser les ressources
L’agence intervient également en tant qu’assistant à maîtrise d’ouvrage sur des diagnostics “ressources” visant à repérer ce qui peut être réutilisé ou revendu sur un chantier.
Sur la démolition de la barre de la Cité, programmée dans le projet de rénovation urbaine du quartier de Marlioz, à Aix-les-Bains, elle est intervenue avec l’Opac de la Savoie et la communauté d’agglomération Grand Lac pour évaluer et mettre de côté les matériaux susceptibles d’être valorisés. Cela a notamment été le cas pour des radiateurs en fonte rachetés par une entreprise de Montpellier. Des portes, du bois, des ballons d’eau chaude quasiment neufs, des lavabos et luminaires plutôt design et 500 m² de dalles Terrazzo ont aussi été « sauvés » de la démolition. Les matières jugées intéressantes ne sont cependant pas toujours récupérables : les essais de démontage du parquet, par exemple, n’ont pas été concluants.
Pour l’anecdote, signalons que, sur les Hauts-de-Chambéry, Kayak a réalisé un diagnostic “ressources” sur l’ancienne école Vert Bois, conçue dans les années 70 par… Bernard Patriarche.
Enfin ! La matériauthèque
Carrelages, portes, fenêtres, gaines électriques, trappes… Depuis quelques semaines – enfin ! –, La Matériauthèque propose, à des prix défiant toute concurrence, des matériaux de construction de deuxième main. La commercialisation s’effectue en ligne ou dans son magasin, installé dans une partie des anciens locaux Folliet, à La Cassine, à Chambéry. Soutenue par différentes collectivités (Grand Chambéry, Grand Lac, Cœur de Savoie, Région) et partenaires (comme France Active ou la fondation Placoplatre), la structure est portée par le collectif Enfin ! Réemploi associant Trialp, Nantet, Les Chantiers valoristes, l’École nationale supérieure des Arts et Métiers et Kayak Architecture. Elle s’adresse, pour l’instant, à une clientèle de particuliers, mais espère que les évolutions réglementaires annoncées lui permettront de s’ouvrir bientôt aux professionnels.
Le collectif compte explorer différentes pistes, comme la récupération de charpentes en bois qui seraient utilisées pour retailler de nouvelles pièces. Il coopère, au niveau régional, avec d’autres matériauthèques, au sein d’un groupe de réflexion destiné à mutualiser les retours d’expérience de chacun.
Sophie Boutrelle
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