Le problème actuel concernant les arbres, y compris en ville, est moins lié aux températures élevées qu’au manque d’eau sur de longues périodes estivales.
En effet, les physiologistes constatent que les plantes peuvent supporter des températures dépassant largement les 50 °C alors qu’un stress hydrique prolongé peut faire mourir des arbres sous des températures bien plus clémentes, en particulier lorsqu’ils n’ont pas accès à une nappe phréatique protégée dans les profondeurs du sol. Ce fut le cas de nombreux hêtres du Jura à la fin de l’été 2022, suite à un printemps extrêmement sec.
Les modèles de prédiction de la composition forestière sous des conditions climatiques modifiées tiennent compte de ce fait et parlent d’un avantage pour les essences xérophiles : bien adaptées à des périodes de sécheresse. Quoi qu’il en soit, il est essentiel de maintenir autant que possible le précieux patrimoine actuel, en particulier les grands et vieux arbres, profondément enracinés.
En effet, leur contribution au bien-être urbain se mesure au nombre de feuilles comme unités d’action physiologique, la photosynthèse étant liée à l’évapotranspiration, facteur de rafraîchissement. L’on comprend ainsi que la première urgence n’est pas de remplacer systématiquement de tels arbres par des jeunes supposés mieux résister aux défis du futur.
Ceux-ci disposent en fait de beaucoup moins de feuilles et leur système racinaire est beaucoup moins profond, ce qui ne leur permet pas d’avoir d’emblée l’effet puissamment climatisant des vieux. L’urgence consiste bien au contraire à soutenir le patrimoine existant au niveau de son approvisionnement en eau, et bien sûr en y ajoutant autant que possible du végétal urbain supplémentaire.
Pour ce faire, les zones construites disposent d’un potentiel largement ignoré à ce jour : les quantités considérables d’eaux de pluie récoltées au cours des saisons par nos toits, qui s’élèvent pour le Plateau suisse à environ 1 m3 par m2 de surface couverte. Les infrastructures urbaines de demain comprendront donc des systèmes de stockage d’eau dans le sous-sol (au niveau des bâtiments et des quartiers) et des réseaux d’acheminement de cette eau vers les racines des arbres. Ceci permettra en outre de végétaliser efficacement les façades, un autre potentiel également trop ignoré encore.
Sources : Larcher, W. : Ökologie der Pflanzen. Verlag Eugen Ulmer 1980 Schnitzler-Lenoble, A. et Arnold, C. : Éloge des lianes. Actes Sud 2022
Ernst Zürcher
Conférencier, écrivain et chercheur
Photo à la une : Ian Taylor sur Unsplash
Cet édito est paru dans le magazine L’Extension Été 2023 >>
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