Courchevel : l’inédite saga judiciaire du PLU

par | 22 février 2018

Voté, attaqué, annulé deux fois, re-voté puis finalement validé dans sa version initiale tandis que la nouvelle version est à son tour attaquée en justice ! Voilà la singulière histoire du Plan local d’urbanisme (PLU) de la très chic commune de Courchevel. Explications et décryptages.

C’est Denis Besle, président du tribunal administratif de Grenoble qui a rapidement évoqué l’affaire lors du bilan d’activité annuel de l’institution (un bilan à retrouver dans notre hebdo Eco Savoie Mont Blanc daté du 23 février) : le nouveau PLU de Courchevel fait lui aussi l’objet de recours.

 

Un secteur « tendu » sur le plan urbanistique

Pas franchement une surprise pour ceux qui suivent le dossier. « Nous sommes dans un secteur tendu en ce qui concerne les questions d’urbanisme », soupire Pierre Perrier, directeur du service urbanisme de la commune nouvelle de Courchevel (qui réunit depuis janvier 2017, Saint-Bon et La Perrière).

Peu d’offres immobilières et foncières, des prix très élevés et des riverains souvent bien au fait de la réglementation et/ou qui ont les moyens de se payer un avocat spécialisé expliquent cette tension, qui est loin d’être nouvelle.

 

7 ans de procédure pour aboutir à 2 PLU en vigueur !

Lorsque la commune de Saint-Bon décide, en 2002, de se lancer dans l’élaboration d’un PLU pour remplacer son Plan d’occupation des sols (POS), la tension est déjà vive. Elle l’est encore plus quand le PLU est bouclé et adopté, en 2011. Le document est illico attaqué au tribunal, à la fois sur des questions de forme (modalités de concertation et d’adoption) et sur le fonds (zonages de certains secteurs). Le tribunal administratif annule l’adoption du PLU en 2014 et la cour d’appel administrative de Lyon confirme cette annulation en 2015.

La commune décide de pousser jusqu’au Conseil d’Etat, l’ultime recours. Mais pendant ce temps, elle lance tout de même, à partie de 2014, l’élaboration d’un nouveau PLU. Ce dernier est approuvé à l’unanimité par le conseil municipal en janvier 2017. Or, en mai 2017, le Conseil d’Etat valide finalement le PLU de 2011 ! La commune se retrouve donc avec 2 PLU en vigueur. Inédit.

La commune de Courchevel abrite l’une des stations les plus chics des Alpes. Crédit photo : Courchevel – David André / Archives.

 

Un parachute en cas de nouvelle annulation

Heureusement, le nouveau PLU ayant été adopté avant la re-validation de l’ancien, c’est bien le nouveau qui s’applique. « Mais nous disposons ainsi d’un document de référence récent, en cas d’annulation de ce nouveau PLU… », explique Pierre Perrier.

En clair, si jamais le tribunal administratif de Grenoble – déjà saisi, mais l’audience n’est pas encore programmée – annule le nouveau PLU de 2017, Courchevel pourra toujours fonctionner avec celui de 2011. Et ne se retrouvera pas avec comme seule base légale l’antique Règlement national d’urbanisme, ce qui aurait été le cas sans la décision du Conseil d’Etat et qui aurait été autrement plus problématique.

 

Sérénité en mairie

Du coup, la sérénité est plutôt de mise dans les couloirs de la mairie. « D’autant que nous avions mis notre nouveau PLU en pré-conformité avec le Scot [NDLR : le schéma de cohérence territorial, qui définit les objectif d’aménagement à l’échelle d’un bassin de vie] qui, lui, a été adopté en décembre 2017 par l’Assemblée des Pays de Tarentaise Vanoise », précise Pierre Perrier. C’est déjà une voie de recours en moins pour les opposants…

 

Jurisprudence inédite à portée nationale

Si la saga du PLU de Courchevel est très particulière, la re-validation de son PLU de 2011 par le Conseil d’Etat a, elle, une portée nationale. « Cet arrêt constitue un revirement majeur de jurisprudence alors que de nombreuses communes avaient vu leur PLU annulé pour des raisons similaires à celles invoquées dans le cas de Courchevel », souligne la commune.

Si l’on veut faire simple, les communes n’ont plus l’obligation dans leur délibération de lancement de la procédure d’élaboration ou révision du PLU, d’être très précises sur les objectifs du PLU ni sur les objectifs de la concertation mise en place dans le cadre de l’élaboration de ce PLU.

 

Ce que dit précisément l’arrêt du Conseil d’Etat :

« en se fondant, pour confirmer l’annulation de la délibération du 17 novembre 2011 approuvant la révision du plan local d’urbanisme de la commune de Saint-Bon-Tarentaise, sur le moyen tiré de ce que la délibération du 27 février 2002 par laquelle a été engagée cette procédure n’avait pas défini de façon suffisamment précise les objectifs de la concertation, la cour [administrative d’appel de Lyon] a commis une erreur de droit »

 

La date d’audience concernant le recours contre le nouveau PLU n’est pas encore fixée. Crédit photo : Patrice Courchevel – Mestari / Archives.

 

Crédit photo haut de page : Les neiges – Courchevel / Archives.

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