Tramway ou pas tramway ? L’agglomération annécienne étudie deux scénarios : l’un qui ne comporte aucune ligne de tram, l’autre une seule… de quoi lui donner du plomb dans l’aile. Les élus trancheront le 18 novembre prochain.
C’était le dossier phare – et clivant – de la campagne municipale d’Annecy l’an dernier, avec la proposition de François Astorg de structurer la mobilité dans l’agglomération autour de lignes de tramway. Le projet semble aujourd’hui dérailler.

Au cours d’un conseil privé “non délibératif”, les élus présents du Grand Annecy (68 sur 95) ont en effet éliminé quatre des six scénarios envisagés par le cabinet Systra. Ils ont travaillé sur un maillage de l’agglomération par trois lignes : l’une relie Seynod à Pringy via Cran- Gevrier et Annecy-centre, la deuxième Épagny aux Glaisins via Meythet et Annecy-le-Vieux, et la troisième dessert la rive ouest du lac jusqu’à Duingt. Toutes se croisent au niveau de la gare d’Annecy.
2 scénarios retenus
Les scénarios proposés allaient du tout tram au tout BHNS (bus à haut niveau de service). Mais dans ceux retenus, ne figurent ni la ligne de tramway sur la rive ouest du lac, ni le projet tout tram. Il en reste seulement deux en lice. Le premier (le E selon l’étude Systra) conserve une ligne de tram pour relier la gare de Pringy à Seynod, le reste étant desservi par des lignes BHNS. Ce premier scénario n’a obtenu que 24 voix sur 68, dont celle de François Astorg, le maire d’Annecy.
La seconde option (F dans l’étude Systra) a recueilli la majorité des voix des élus présents – dont celle de Frédérique Lardet, la présidente de l’agglomération – soit 44. Elle se passe totalement de tramway et retient, à la place, la solution du tout BHNS électrique. Dans les deux cas de figure, c’est donc bien le BHNS qui a été préféré pour la rive ouest du lac, tronçon reliant Duingt à Annecy. Il empruntera le tunnel de la Puya, qui devra faire l’objet d’une remise en conformité.
Quel que soit le scénario retenu, « tout se fera en site propre intégral », les lignes de bus circulant sur des doubles voies qui leur seront entièrement dédiées. « Le BHNS est souvent apparenté aux lignes Rythmo qui ne sont pourtant pas uniquement en site propre. Ici, peu importe le matériel roulant, tout sera en intégral. C’est une décision importante car très peu d’agglomérations font ce choix-là », déclare Frédérique Lardet.
300 millions d’euros

Pour lancer ce projet de schéma de transports en commun en site propre intégral (TCSPI), 300 millions d’euros (M€) vont être inscrits dans le plan pluriannuel d’investissement (PPI) pour les cinq ans à venir. Le scénario E, celui avec la ligne de tram, est estimé à 708 M€ (603 M€ d’infrastructures, 45 M€ de matériel roulant et 43 M€ de foncier) – « du fait du dépôt à ajouter pour le tram », précise Denis Duperthuy, vice-président aux finances du Grand Annecy –, contre 559 M€ pour le scénario F sans tram, jusqu’ici préféré (485 M€ d’infrastructures, 37 M€ de matériel roulant, 37 M€ de foncier).
Les élus ont fait le choix des options les moins chères. Cela a-t-il fait pencher la balance ? « Ce ne sont pas des solutions au rabais », insiste Denis Duperthuy. « Notre budget transport va passer de 7,50 M€ en 2021 à 60 M€ en moyenne par an grâce à cet investissement de 300 M€. C’est quasiment dix fois plus, même si l’on fait le choix de la croix en BHNS. » Un projet inédit selon lui : « Nous allons faire en quinze ans ce que l’on faisait en soixante-quinze ! » L’enveloppe de 300 millions servira à réaliser les deux premières branches. Afin de les financer, Frédérique Lardet explique vouloir « recourir principalement à l’endettement, car l’Agglomération a la chance d’être jeune et très peu endettée ». La présidente compte bien obtenir des subventions, notamment par le biais du Département de la Haute- Savoie et du plan État-Région, pour 25 % de l’investissement. Cela passera également par une hausse de la fiscalité.
« Ces hausses d’impôts vont concerner à la fois les entreprises, avec le versement “Mobilité”, mais aussi les foyers fiscaux, via la taxe foncière, puisque l’agglomération en touche une partie », détaille Denis Duperthuy. En tout état de cause, Frédérique Lardet s’est engagée à « ne pas dépasser les 1,6 % pour le versement “Mobilité” ». Prochaines étapes : la tenue de trois réunions publiques (les 2, 9 et 16 novembre ; voir détails sur grandannecy.fr rubrique Actualités) avec les habitants, et le conseil communautaire du 18 novembre prochain, où sera soumis au vote le choix définitif du scénario, l’enveloppe de 300 M€ fléchée sur ce mandat et les deux branches jugées prioritaires pour le lancement des travaux.
Premier coup de pioche pas avant 2024
Question calendrier, il faudra compter a minima dix-huit mois d’études opérationnelles, trente mois de procédure, cinq mois d’appel à candidatures pour le choix des entreprises et, enfin, entre vingt-deux et vingt-huit mois de travaux, en fonction du scénario retenu… Finalement, le premier coup de pioche ne sera pas attendu avant 2024. Quoi qu’il arrive, l’augmentation de la fiscalité interviendra avant la fin du mandat. « Car il est hors de question de laisser ces choix financiers à ceux qui nous succéderaient. Nous allons assumer ce que nous lancerons », souligne la présidente de l’agglomération.

Un modèle « structurant, qui repense la ville apaisée »
Jean-Luc Rigaut, ancien maire d’Annecy et ancien président de l’agglo, plaide pour un modèle « structurant, qui repense la ville apaisée ». Et, selon lui, cela passe par un tramway « qui s’use moins que les bus en termes de coût d’exploitation dans la durée, avec un taux d’attractivité bien meilleur ». L’élu trouve l’axe Seynod-Pringy pertinent, et pense qu’une ligne de tram « de l’avenue de Cran au pont de Tasset ouvre un grand couloir urbain que l’on identifie et que le tram incarne ».
« Si vous faites une ligne de bus, ça ne donne pas la même chose », estime-t-il. Par ailleurs, il émet des réserves sur le BHNS au bord du lac : « Repasser dans le tunnel de la Puya, sur le papier c’est bien, mais dans la vraie vie, cela ne marche pas comme ça. Il faudrait reconstruire un tunnel à côté pour la sécurisation des personnes. » Quant aux financements, Jean-Luc Rigaut soulève : « Le Département a la compétence pour le tunnel, mais pas pour le bus. Le projet a pris du retard, ce qui a fait perdre 10 à 15 % de financement que l’on aurait pu avoir par l’État avec l’appel à projets Transports collectifs en site propre. »
« Neuf Annéciens sur dix ont voté pour un scénario avec tram »
Un an et demi après avoir scellé leur alliance, François Astorg, maire d’Annecy, et Frédérique Lardet, présidente du Grand Annecy, ne semblent plus être sur la même longueur d’onde. Le dossier du tram creuse un peu plus le fossé entre les deux élus. François Astorg et Frédérique Lardet, respectivement écologiste et LREM, avaient fusionné leurs listes lors des élections municipales de l’an dernier pour accéder à la victoire. Depuis, la présidente de l’agglo a créé un groupe politique autonome au sein du conseil municipal d’Annecy. Sur le choix du transport en commun en site propre (TCSP), les deux élus sont en désaccord.

Alors que la majorité des conseillers communautaires – dont Frédérique Lardet – s’est prononcée pour le scénario “tout BHNS” (bus à haut niveau de service), l’édile écologiste fait partie des rares à avoir voté pour le projet qui prévoit une ligne de tram (scénario E). Et pour cause, depuis son élection à la mairie d’Annecy, François Astorg avait fait du tram un élément central de son programme en matière de mobilité. « Lors des dernières élections, neuf Annéciens sur dix ont voté pour un scénario dans lequel il y a un tram », plaide le maire. « Il n’est pas question que ce débat leur soit confisqué. Je ne souhaite pas une solution qui conviendrait à Annecy, la ville centre, et pas aux autres communes, mais je n’accepterai pas non plus une solution qui conviendrait aux autres communes et pas à la ville centre et à ses 130 000 habitants. »
Concernant le coût du projet, François Astorg pense « la problématique financière cruciale, mais elle ne doit pas être la seule pour la décision que nous nous apprêtons à prendre. » Et tout comme pour le projet Lola (Liaison ouest du lac d’Annecy) voulu par l’ancien maire Jean-Luc Rigaut, le maire de la commune nouvelle estime que « vu l’ampleur du projet, il y aura nécessairement une saisine de la Commission nationale du débat public ». Et d’ajouter : « La question est de savoir si c’est l’agglomération qui la mènera, ce que je souhaiterais, ou, si ça ne se fait pas, d’autres organisations dont je ne doute pas qu’elles le feront. Et aujourd’hui, la Commission nationale devra aussi nous accompagner sur le débat citoyen dont on a besoin. » Verdict le 18 novembre.
Alexia Bontron
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On marche décidément sur la tête. Après les échecs successifs des différentes COPs, on continue en 2021 à ne pas donner priorité aux tramways et aux trains. « Lors des dernières élections, neuf Annéciens sur dix ont voté pour un scénario dans lequel il y a un tram », plaide un François Astorg pris dans un étau malgré lui. Comment Frédérique Lardet a-t-elle pu faire enterrer le projet de tramway sur la rive ouest du lac en deux réunions ? Cette histoire est très malsaine et les arguments ne tiennent pas la route. Dans l’encadré rouge vous citez Didier Sarda et écrivez « En outre, ses voies (le BHNS) pourraient être empruntées par les mobilités douces, contrairement à celle d’un tramway. » Pourquoi écrire cela alors que c’est faux ? Ce monsieur est-il déjà allé à Grenoble ? A-t-il déjà pris un tramway ? Le tramway peut très bien être partagé avec les vélos. Il faut relancer ce projet et faire entendre la voix des citoyens. Pensons à nous, et à l’avenir. Parceque pour l’instant, Annecy se noie sous le béton des immeubles en construction et sous les gaz d’échappement des voitures pris dans les embouteillages à toute heure de la journée.
Comme d’habitude, une fois élue, la macronisette renie ses engagements. Il me semblait que le nouveau monde… était différent de l’ancien!
La belle se fait une place sur le tram et l’oublie une fois élue.
Rien ne change.
Salutation.
Le tramway c’est certes plus cher mais autrement plus qualitatif, car entre autre nettement plus confortable. Si dans un moyen de déplacement sur rail tel que le train, le métro ou le tramway, donc guidé, les passagers bougent, sur une surface plane (dimension 2), du fait du déplacement du véhicule, dans un BHNS, qui faut-il le rappeler n’est qu’un bus, ce déplacement se fait aussi en hauteur donc dans l’espace (dimension 3), car le plateau de roulement devient très vite difforme (phénomène d’ornière).
Il fut un temps où le tramway avait tellement mauvaise presse, qu’on le qualifiait de » véhicule léger sur rail » ou de « LRT » ou » métro léger », pour finir par de nouveau l’appeler tramway, tout simplement parce qu’il s’agissait tout simplement d’un tramway, et qu’il avait ses preuves malgré les lobbys automobiles et pétroliers (avec la connivence de beaucoup de décideurs de l’époque) pour l’éradiquer des villes américaines et européennes.
Ainsi je qualifie le BHNS (puisque on adore donner des nouvelles appellations à de l’existant revu et corrigé) de Bus à Haut Niveau de
Sévices.
Je soutien pleinement le maire d’Annecy M. Astorg, dans sa vision à long terme pour le déplacement qualitatif (je le répète) de ses administrés. Voilà un homme qui dit clairement vouloir rechercher dans leur déplacement une qualité de vie qu’ils n’auront pas avec le BHNS (Bus à Haut Niveau de Sévices).