Comparatif France / Suisse : élus locaux, combien gagnent-ils ?

par | 25 juin 2025

On ne fait pas de la politique pour devenir riche, dit-on. Le niveau de rémunération des élus locaux, en Suisse comme en France, tend à donner raison à l’adage. S’il ne décourage pas l’engagement politique des citoyens, il n’est cependant pas à négliger.

En Suisse, la majorité des élus exercent leur mandat à temps partiel tout en conservant une activité professionnelle selon le principe de la milice, qui s’applique également à l’armée, et date du XIXe. Ce système repose sur l’idée que la politique est un service rendu à la collectivité tout en évitant que l’élu soit coupé de la réalité du terrain.

En France, en revanche, la politique est souvent une carrière à plein temps. Ce professionnalisme remonte au XIXe siècle avec un fait marquant. Le 3 décembre 1851, en pleine insurrection contre le coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte, le député de l’Ain, Alphonse Baudin, meurt sur une barricade parisienne, incarnant le combat pour la démocratisation de la vie politique. A l’époque, l’idée que les députés soient indemnisés pour leur mandat faisait encore débat, nombreux estimant que la politique devait rester l’apanage d’élites fortunées n’ayant pas besoin de rémunération pour vivre.

Ce que contestait Alphonse Baudin qui voulait que la politique soit accessible à tous. Sa phrase – « Vous allez voir comment on meurt pour cinq francs ! » – adressée à une foule hostile qui l’accusait de défendre l’argent plutôt que la République, est devenue célèbre. Ce professionnalisme vise aussi à assurer la disponibilité des élus et une certaine compétence, mais, en contrepartie, il y a un risque de les couper du quotidien de leurs électeurs.

En Suisse, les rémunérations des exécutifs communaux varient en fonction du canton. En Ville de Genève, par exemple, les membres du Conseil administratif, au nombre de cinq, sont payés, pour un plein temps, environ 265 000 francs annuels. Par un système de tournus, chaque membre occupe la fonction de maire pendant un an et il bénéficie à ce titre d’une indemnité de représentation de 19 700 francs.

Quant aux élus non professionnels du Conseil municipal, ils sont rémunérés par séance plénière, environ 143 francs, ou par commission à raison d’environ 110 francs l’heure. Des montants qui pourraient augmenter de 25 % à l’avenir. « Cependant, précise Pierre Nicollier, président du PLR Genève, les élus doivent reverser une partie importante de ces jetons de présence à leur parti pour assurer son fonctionnement. »

Cumul des mandats

En France, la rémunération des maires dépend du nombre d’habitants de la commune, mais aussi de leurs responsabilités et du cumul de fonctions.

« En France, les rémunérations des élus sont très encadrées et très plafonnées, explique Vincent Scattolin, maire de Divonne-les-Bains. Le niveau est assez faible au regard des responsabilités actuelles. Un élu, par exemple, qui est dans une commune de moins de 3500 habitants, ce qui est aujourd’hui le cas d’une majorité, va gagner 2100 euros bruts par mois. Pour le maire d’une ville comme Divonne-les-Bains, l’indemnité, au niveau brut, se situe autour des 3000 euros. » Pour une ville de la taille de Lyon, par exemple, l’indemnité peut atteindre entre 7 000 et 8 000 euros.

La rémunération des adjoints au maire dépend également du nombre d’habitants. Si celui-ci se situe en dessous de 500, le montant mensuel s’élève à environ 400 euros pour grimper jusqu’à près de 3000 euros pour une métropole de plus de 200 000 habitants. Et toutes les communes ne rénumèrent pas leurs conseillers municipaux. Un niveau de rémunération qui oblige à conserver une activité professionnelle ou à cumuler les mandats.

« C’est particulièrement le cas dans un territoire comme le nôtre où le logement est cher et où, de manière générale, les prix moyens sont plus élevés qu’ailleurs en France, remarque Vincent Scattolin. Concernant le cumul des mandats, en tant que maire certains sont compatibles avec la fonction, par exemple, dans mon cas, tout ce qui est en lien avec l’agglomération et le pays de Gex. Un mandat à l’échelle départementale ou régionale peut aussi être intéressant car il y a des complémentarités avec nos territoires. En tant que vice-président d’agglomération, par exemple, je touche 1700 euros bruts. »

Revaloriser l’engagement politique

Ces dernières années, en Suisse comme en France, les communes – surtout les plus petites – peinent souvent à trouver des personnes prêtes à s’engager. « L’aspect financier est une réalité, reconnaît Vincent Scattolin, mais on ne s’engage pas en politique pour l’argent. J’ai quitté mon travail à Genève pour me consacrer entièrement à la mairie une fois élu, mais quand j’avais décidé de me présenter, en 2019, savoir ce que je vaudrais sur le marché du travail à la fin de mon mandat faisait partie de mes interrogations. En tant que maire, on développe des compétences, on gère des équipes, on est confronté à des problématiques et des situations plutôt complexes, mais j’ignore comment cela peut être valorisé ensuite auprès d’un employeur. »

Pour Pierre Nicollier également, la rémunération n’est pas l’enjeu principal. « La question est de savoir comment on concilie sa vie professionnelle et politique. On voit que ce sont souvent les indépendants qui y arrivent le mieux ainsi que les collaborateurs de l’État car ils ont des facilités pour s’organiser. Il y a un tournus très important durant les législatures. »

Durant la dernière législature de 2021 à 2025 dans le canton de Genève, 285 membres sur 938 de conseils municipaux ont démissionné. « Je ne suis pas sûr qu’augmenter les jetons de présence permettra d’améliorer la situation, reprend Pierre Nicollier. Le problème est plutôt lié à une reconnaissance de moins en moins importante au sein de la société et à un climat politique qui se durcit. »


Odile Habel


Cet article est issu de notre magazine L’Extension Été 2025 disponible gratuitement au format liseuse en ligne ici >>

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