France-Suisse : terres agricoles, une ressource à préserver

par | 13 novembre 2024

De plus en plus rares dans le canton de Genève, elles sont également grignotées dans d’autres territoires de Suisse moins urbanisés. En France, la loi ZAN vise à lutter contre l’artificialisation des sols selon différentes étapes, avec une échéance fixée à 2050 pour atteindre un équilibre entre les surfaces de sols artificialisés et les surfaces réhabilitées.

« Il ne reste que quelques maigres hectares, constate Héloïse Candolfi, directrice d’AgriGenève. 45 % du territoire genevois est en zone agricole, mais ces surfaces ne correspondent pas forcément à des surfaces agricoles utiles et sont parfois utilisées à d’autres fins. Les surface d’assolement (SDA) ont été petit à petit mangées par de gros projets urbains et infrastructurels. »

Comme Bernex Nord qui s’étend sur près de 120 hectares ou encore le programme de logements de Veyrier. Le territoire connaît un fort développement démographique exerçant une pression énorme, mais disposant d’une particularité : la maîtrise de son aménagement est de la compétence de l’État de Genève et les communes doivent se conformer aux dispositions cantonales. Alors que dans les autres cantons, ce sont les communes qui ont cette compétence.

« Le développement du canton de Genève se fait de façon plus cohérente, note Héloïse Candolfi. Même si l’équation entre préservation des terres agricoles et développement est terriblement difficile à appliquer », analyse-t-elle, précisant que « lors de la présentation du plan directeur cantonal de Genève, la Confédération a sonné l’alarme intimant au canton de revoir les déclassements de zone agricole à la baisse. » En clair, il s’agit de privilégier la densification plutôt que l’étalement urbain, éventuellement de verticaliser les constructions, de surélever l’existant.

Conserver les meilleures terres

Ces surfaces d’assolement « ont été créées durant la Seconde guerre mondiale alors que la Suisse n’était plus en capacité de pourvoir à l’alimentation de la population », précise-t-elle. Une mesure connue sous le nom de plan Wahlen qui a permis de déterminer un nombre d’hectares agricoles par canton, un quota qui à Genève s’élève à 8 400 hectares.

« L’idée était de mettre à profit les meilleures terres suisses pour une production maximale », résume la directrice. Pour autant, elles ne sont pas sanctuarisées et font l’objet d’un inventaire adopté en 1993, mis à jour en 2009 et réexaminé annuellement depuis une dizaine d’années. Ce ne sont pas des zones d’affectations qu’il faut déclasser pour déterminer une autre destination. En résumé, dès qu’une construction s’élève dessus, elles sortent de l’inventaire.

Au niveau confédéral, la deuxième mouture de la loi sur l’aménagement du territoire (LAT2) est en cours de révision pour protéger davantage les zones agricoles. Ainsi toute nouvelle construction devra être compensée par la démolition d’une autre infrastructure.

« La question porte sur comment réguler ? Qui va payer ? Le constructeur ou le propriétaire du bâtiment démoli ?, interroge Heloïse Candolfi. Cette révision est source de complexité administrative par certains aspects et résout des problématiques, en amenant d’autres. »

Zéro artificialisation nette en France

Côté France, la loi Zan vise à lutter contre l’artificialisation des sols selon différentes étapes, avec une échéance fixée à 2050 pour atteindre un équilibre entre les surfaces de sols artificialisés et les surfaces réhabilitées. En clair, si les collectivités convertissent des parcelles naturelles en zones à construire, elles vont devoir les compenser au mètre carré près. Une mesure de préservation des espaces, pas toujours simple à appliquer selon les territoires et la pression foncière existante.

Installations sous contraintes des jeunes agriculteurs

L’Office cantonal de l’agriculture et de la nature réfléchit à trouver des solutions pour l’installation de nouveaux agriculteurs avec des dispositifs d’aide et d’accès à la terre. La tendance est plutôt à l’agrandissement de domaines avec des rachats par des agriculteurs déjà installés. « Les exploitations se concentrent, elles sont moins nombreuses et globalement plus étendues », estime Héloïse Candolfi, directrice d’AgriGenève.

Un constat partagé par l’organisation paysanne Uniterre qui souligne un paradoxe : « Les métiers de la terre sont les seuls CFC (Certificat fédéral de capacité décerné en fin d’apprentissage NDLR) en croissance, note Éline Müller, coordinatrice des questions d’accès à la terre du syndicat paysan. Des jeunes qui aimeraient lancer des projets agricoles se retrouvent coincés car sans terre. »

Les jeunes en question ne sont pas issus de familles d’agriculteurs. « Le système est très lié à la propriété sur la base d’un système patrilinéaire où les transmissions se font de père en fils », ajoute-t-elle. Et quand les transferts sortent du giron familial, c’est un autre agriculteur qui se porte acquéreur, sachant que « ce secteur est celui qui est le plus endetté en Suisse », poursuit la coordinatrice d’Uniterre précisant qu’il est « interdit de vendre des terres agricoles à quelqu’un qui ne va pas les exploiter à titre personnel ».

Une mesure qui a, dans une certaine mesure, contribué à préserver les terres cultivables helvètes, mais freine les installations des nouveaux entrants. Sans négliger les baux agricoles dont la périodicité se réduit : « suivant le projet, ça peut être très compliqué » de ne pas pouvoir se projeter à plus long terme.

Sandra Molloy


Cet article est issu de notre magazine L’Extension Automne 2024, disponible gratuitement au format liseuse en ligne.

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