Stéphane Hessel s’est éteint à 95 ans. «Il est mort, il est sanctifié» aurait dit Georges Brassens. La pensée politiquement correcte en avait fait une idole du moment, inspirateur d’un mouvement d’indignation universelle soulevant les foules de Rome à Madrid, en passant par New-York. En fait, la vitalité de son âge fut plus remarquable que la profondeur de l’esprit de son ouvrage “Indignez-vous”, que le mouvement de protestation éponyme récupéra pour s’opposer pêle-mêle un peu à tout. Certes, en ce bas monde, les motifs d’indignation ne manquent pas, mais si l’on ne veut pas rester dans la posture de principe et l’incantation rituelle, il convient d’ébaucher une alternative, des pistes d’action. Chez Hessel et en cela, il est parfaitement en phase avec la pratique médiatique, on s’indigne, on s’émeut, on crie au scandale, on dénonce, on fait pleurer dans les chaumières mais, ni on ne propose, ni on ne construit quoique ce soit. Le vote italien ressemble plus à un bras d’honneur, compréhensible, mais stérile et dangereux. Que le soleil chauffe de trop et on s’indigne de la chaleur de ses rayons, que le ciel déverse des trombes et l’on s’indigne encore que l’eau mouille. Sans chercher ni à comprendre, ni à s’en prémunir, encore moins à l’utiliser. À ce stade, ce n’est pas de la résistance ou de l’indignation, c’est du réflexe de Pavlov. Le taureau aussi renacle et souffle sa colère devant le chiffon rouge. Cette posture émotionnelle, puis compassionnelle, régulièrement utilisée par les médias pour capter l’attention et par les politiques pour s’éviter de traiter le fond, ne débouche que sur une bonne conscience qui exonère une réflexion globale et un remède alternatif cohérent. De là à passer à une attitude de “ y a qu’à” et de “faut qu’on” simpliste, il n’y a qu’un pas vers […]