L’escalade en salle est en bonne voie. Ouvertures et rénovations se multiplient en Pays de Savoie aussi.

Le monde de l’escalade est en mouvement. En mouvement ascendant. En France, une salle ouvre au minimum tous les mois. Et en Pays de Savoie, les créations, rénovations et agrandissements ont connu un vrai coup d’accélérateur depuis la crise de la Covid. Dans la seule agglomération annécienne, deux nouvelles adresses – Space Bloc et Atome – ont vu le jour depuis 2021 et deux agrandissements – Ablok et Cortigrimpe – ont été effectués en 2022. Des réalisations qui s’inscrivent en parallèle d’une offre bi-départementale déjà bien fournie.

« On est trop nombreux« , commente Aurélien Di Piazza, gérant associé, avec Jérôme Corny, de la Zipette (ex-Corti 73), à Voglans. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir un projet d’agrandissement à court terme pour pallier le « manque de place » constaté. La grimpe en intérieur fait de plus en plus d’adeptes et certains prédisent que ce n’est qu’un début.

« Le plus gros du travail consiste à faire comprendre aux gens qu’on peut aller grimper comme on va à la salle de sport, explique Hugo Allard, fondateur et actionnaire d’Ablok. »

« Plus on est nombreux, plus on crée des consommateurs. On est en train de sortir d’un marché de niche.  Alors oui, on est nombreux, mais cela va développer le nombre de pratiquants. » Pour lui, il s’agit de créer une offre pour décupler le besoin, sur le modèle éprouvé des salles de sport.

Ablok, qui a une salle à Grenoble depuis 18 ans, vient d’ailleurs d’ouvrir son deuxième équipement à Argonay et avertit ne pas vouloir s’arrêter là. « On travaille déjà sur une troisième ouverture à Grenoble en 2023 ou 2024, puis on concrétisera certainement des projets sur les deux Savoie », confirme-t-il.

Pour s’implanter dans l’agglomération annécienne, Ablok a racheté Bloc Trotters à Fabien Coisne en 2022 (qui demeure directeur) et, après six mois de travaux et un investissement de 300 000 euros pour rénover la salle et doubler sa surface de grimpe, l’a rouverte en septembre. « Depuis, poursuit-il, on réalise 10 % de plus par rapport à notre prévisionnel tous les mois. » Le chiffre d’affaires 2023 devrait atteindre 500 000 euros.

Un autre acteur historique de l’escalade en salle annécienne a visiblement lui aussi le vent en poupe. Cortigrimpe, salle de cordes et de bloc installée depuis 2015 à Metz-Tessy, vient d’injecter 300 000 euros dans son établissement pour en doubler sa surface. Rouverte en septembre 2022, la salle offre désormais 1000 mètres carrés à gravir.

« Et au printemps, nous allons faire un autre mur extérieur, de 100 mètres carrés », détaille Joël Lansard, actionnaire et cogérant (avec Hervé Chappaz). Avec ses neuf permanents, Cortigrimpe a réalisé un chiffre d’affaires de 650 000 euros en 2021 et envisage de créer une deuxième salle à Seynod.

Face à ces deux pionniers locaux, Eric et Rémi Letailleur (le père et le fils) ont quant à eux fait le pari d’ouvrir une salle toute neuve à Sillingy : Space bloc. Depuis septembre 2021, ses 700 mètres carrés de surface grimpable connaissent un certain succès, qui motive d’ailleurs les investisseurs à concrétiser un agrandissement de 750 mètres carrés, probablement en 2023.

« Nous disposons du même volume exploitable à côté », indique Eric Letailleur, que rien ne prédisposait à se lancer dans cette activité. « C’est une reconversion pour moi et pour mon fils », dit-il. Aujourd’hui, six personnes, dont quatre membres de la famille, travaillent sur place. Après un investissement de départ de quelque 500 000 euros, l’entreprise a concrétisé un chiffre d’affaires du même montant pour sa première année.

Annecy et sa région ne concentrent pas les nouveautés en termes de murs et de prises. A Savoie Technolac (La Motte-Servolex), Vertilac a été rachetée en 2019 par le groupe Climb up (Lyon) qui compte 29 salles en France. Aux Houches, Mont Blanc escalade, qui existe depuis 2000, a été rachetée en juin dernier par Claire Jurine-Gastaud, gérante, entre autres, de la holding Prosneige (Les Belleville).

Depuis cet été, 50 000 euros de travaux y ont déjà été réalisés et les rénovations doivent se poursuivre au printemps, lorsque l’activité sera moindre. Son directeur, William Raux, espère atteindre un chiffre d’affaires de 400 000 euros sous deux ans grâce, entre autres, au programme de rénovations et à la nouvelle activité de restauration. Le manque de neige, les conditions difficiles en cascade de glace, la météo pluvieuse… favorisent son ascendance au pays de l’alpinisme.

Wattabloc : une Scop pour s’élever tous ensemble

A Saint-Alban-Leysse, une salle de bloc pas comme les autres a ouvert ses portes en septembre 2019 : Wattabloc. Si sa taille (80 itinéraires), ne la distingue pas particulièrement de l’offre locale, sa forme juridique est en revanche une exception notoire. Wattabloc est en effet une société coopérative de production. Créée par Rémi Ravey, Maxime Tavan et Paul Martel (ces deux derniers étant les co-gérants), elle compte six salariés, dont quatre sont coopérateurs.

« Quand on a eu ce projet de salle, se souvient Paul Martel, la question du statut s’est posée. On a opté pour la coopérative car cela porte des valeurs qui nous parlent : l’équité, la transparence, la reconnaissance. »

Après trois ans d’expérience, le bilan apparaît très positif : « Les décisions sont prises tous ensemble, une grande autonomie est laissée à chacun, on s’adapte aux contraintes et aux envies des salariés… Ce n’est que du positif. » Et ça marche, puisque les prévisions de départ ont tout de suite été dépassées. En 2022, Wattabloc affiche un chiffre d’affaires de 367 000 euros qui permet à tout le monde de percevoir le même salaire.

Atome : le défi du centre-ville

Ouvrir une salle de bloc en centre-ville d’Annecy, au sein de la galerie des Galeries Lafayette, c’est le pari osé que se sont lancé les sept associés d’Atome climbing, tous issus de l’industrie de l’outdoor. Le local de 1 000 mètres carrés, qui comprend des surfaces de bloc et un espace de restauration, a ouvert ses portes le 11 juillet 2022. « Depuis, les objectifs que nous nous étions fixés ont été atteints, nous sommes en constante progression », assure Helena Celestini, associée-gérante.

Dès sa conception, le projet avait pour ambition de toucher une clientèle de centre-ville, désireuse de ne pas prendre sa voiture pour aller grimper. Il s’agissait aussi d’atteindre un public jusque-là éloigné de la grimpe, mais qui la découvrirait en flânant dans la galerie. « On comptabilise une part importante de découvertes dans nos entrées », confirme-t-elle.

La salle, qui emploie une quinzaine de personnes, dont 7 pour l’escalade et 8 au restaurant (ce dernier étant en location gérance avec un restaurateur), propose, entre autres, la seule « kilterboard » de France (mur inclinable relié à une application).