Cette semaine encore, je n’ai pas acheté Charlie hebdo. Non que je ne le voulais pas, mais comme tant d’autres, je n’ai pu satisfaire mon envie face à l’ampleur de la demande, et ceci malgré un tirage près de 100 fois supérieur à la normale. Toute la France voulait son exemplaire du numéro de la résurrection; cinq millions de personnes ont souhaité acquérir ce journal, comme ils auraient acquis la carte d’un nouveau parti politique, pour la brandir comme un étendard.

Cet élan participait de la même volonté d’unité que celui manifesté par 4 millions de Français le dimanche 11 janvier. Celui d’une France Black-Blanc-Beur désireuse de se retrouver autour de ses valeurs républicaines : liberté, égalité, fraternité.

Mais derrière cette unité dans laquelle nous avons tant besoin de nous draper, pour échapper au souffle glacial de l’obscurantisme, apparaissent quelques failles.

Les premières, peu dangereuses, sont celles laissées par quelques vautours mercantiles, plus intéressés par leur enrichissement personnel que par les pleurs d’une nation, à l’instar de ceux qui, dès son jour de sortie, vendaient sur internet quelques exemplaires du dernier Charlie hebdo au prix de l’or, ou de ceux encore qui se précipitaient à l’INPI pour tenter d’y enregistrer le fameux slogan « Je suis Charlie ».

Les secondes sont à mettre au crédit des nombreuses voix qui se demandent bruyamment pourquoi les provocations de Charlie hebdo sont encensées quand celles de Dieudonné sont censurées et condamnées. Est-ce l’ignorance ou l’aveuglement qui leur font confondre « l’incitation à la haine raciale » avec une démarche en tout point opposée de dénonciation de la bêtise engendrée par les religions ? De cette confusion sont nés de nombreux blogs et groupes de discussion affirmant « je ne suis pas Charlie », voire « je suis Kouachi » et allant jusqu’à soutenir les actes des deux frères.

Enfin les dernières, révélées notamment par le groupe de hackers Anonymous, sont celles creusées par les milliers de sites islamistes qui entretiennent ces raisonnements et incitent au terrorisme.

Pour ne pas s’infecter davantage, toutes ces plaies nécessitent que chacun de nous soit désormais, et pour longtemps, acteur du changement. Alors, sans récupération politique, sans amertume et sans pathos, restons mobilisés contre le fanatisme et pour la tolérance. Restons Charlie pour toujours !