L’Ain possède un tissu important de PME, lesquelles sont avant tout des entreprises familiales. Une vraie richesse, mais qui rend d’autant plus preignant l’enjeu de la cession ou succession.
La transmission représente un moment clé dans la vie d’une société et nécessite de nombreuses anticipations. Mais lesquelles ? Et dans quel délai ? Le sujet a été abordé, le 6 décembre, lors d’une table ronde organisée à l’occasion de la parution de la sixième édition de notre hors-série Top 300 des entreprises de l’Ain.
La soirée, organisée en partenariat avec Auvergne-Rhône-Alpes Entreprises, le Conseil départemental et la Banque Populaire Bourgogne-Franche-Comté et Pays de l’Ain, a également été l’occasion de remettre les trophées Éco 2023 (lire ci-dessous). Le département, fortement industrialisé, compte une forte proportion de PME. Par nature, celles-ci sont souvent des structures familiales.
« J’ai la conviction que ces entreprises sont plus fortes. Elles ont un attachement au territoire. Tout cela est important et a du sens dans un monde où tout se dématérialise et se virtualise », explique Bernard Reybier, président de l’association Family business network Rhône-Alpes & Auvergne (FBN) et président de Fermob.
Ces sociétés sont plus enclines à se développer localement, à préserver et à créer de l’emploi local. Pour les banques, elles sont une valeur plus sûre. Elles présentent un moindre risque d’échec à la transmission. Bernard Reybier conserve cependant une certitude, la vie ne peut pas toujours être un long fleuve tranquille et c’est valable également pour les entreprises.
Exemplarité
Stéphane Rostaing, président de la SAS éponyme et du Medef de l’Ain, va plus loin. « L’entreprise familiale peut constituer un piège pour ses héritiers. Si elle est souvent bâtie sur des valeurs de transmission, des valeurs humaines, tous ne sont pas nécessairement intéressés à la reprendre, ce qui impose au repreneur de racheter leurs parts. Par ailleurs, quand on porte le nom de la société, il faut être exemplaire, montrer que l’on est capable. Bien souvent, il faut mettre les bouchés doubles », s’exclame le dirigeant, qui représente la sixième génération dans l’entreprise.

Cette situation Régis Gaude, gérant de Rotin Filé, à Pont-d’Ain, la connaît bien. « Lorsque mon père est décédé en mars 2014, j’ai à la fois dû faire son deuil et reprendre la société. J’avais déjà travaillé quelques années dans l’entreprise, mais je ne connaissais pas tout. J’ai dû refaire mes preuves auprès des amis de mon père et auprès des banques. Il a été difficile de crédibiliser l’entreprise, nous avons redémarré en bas de l’échelle. Avec ma mère et ma sœur, nous avons découvert d’importants problèmes dans l’entreprise que mon père nous avait caché. Heureusement, il avait souscrit une assurance “homme clé” qui nous a aidé à passer le cap. Mais, il a fallu se battre. Aujourd’hui, nous dépassons pour la troisième année consécutive le million d’euros et nous employons une dizaine de salariés, contre deux et demi à la reprise. »
Ces difficultés ont finalement incité sa mère et sa sœur à se retirer de l’entreprise. Si se retrouver seul chef à la barre a facilité la gestion, le dirigeant regrette de ne plus partager cette aventure en famille.
Anticipation
Pour évite les problèmes, Bernard Reybier conseille de préparer la transmission sur dix ans au moins. Une durée plus courte reste envisageable, bien sûr, mais le président de FBN insiste : il est toujours préférable d’anticiper le plus possible. Notamment pour bénéficier des outils mis à disposition par l’État, comme le pacte Dutreil, mais également pour pouvoir s’appuyer sur les expertises des banquiers, notaires, experts-comptables et autres spécialistes du sujet.
Du côté de l’acquéreur, deux années de préparation semblent le strict minimum. « Commencer dans l’entreprise en bas de l’échelle permet également de gagner de la légitimité dans l’entreprise », ajoute Stéphane Rostaing.
Dans tous les cas, le partage d’expérience est essentiel. Quand un dirigeant est omniprésent ou omniscient, garde pour lui seul les rênes, la cession devient impossible ou presque. Accompagner la reprise est important, mais le cédant doit aussi savoir s’effacer.
Les lauréats des Trophées Éco 2023
À l’occasion de la sortie du hors-série Top 300, l’Éco de l’Ain a remis ses prix. Cette année, le trophée de la meilleure entrée dans le top est attribué à Orosolv. Basée à Oyonnax, l’entreprise spécialisée dans le secteur de la chimie est arrivée en 289e position, grâce à la progression de son chiffre d’affaires.

Avec +223,7 % au classement des plus fortes hausses de chiffre d’affaires, Nutripack, fabricant d’emballages alimentaires écoconçus, remporte celui de la plus forte progression.

Spécialisée dans le réemploi de matériels industriels, Cofiem est pour sa part lauréate de la catégorie environnement.

Dans la thématique de la soirée, Dessica est sélectionnée pour son initiative RH : une transmission réussie, non pas aux enfants des dirigeants mais aux salariés par le biais d’une société coopérative.

Enfin, Mob-e-Scrap remporte le trophée de l’initiative innovation. La start-up développe une technologie de recyclage des déchets multicouches et composites.

Joséphine Jossermoz
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