Immobilier : un marché en mutation

par | 10 janvier 2024

Entre l’inflation, les lois ZAN et climat et la montée des taux, le secteur de la construction et, plus généralement, l’immobilier font face à une baisse de l’activité.

« Nous constatons une baisse ou en tout cas une stagnation de la construction neuve sur le département. Tout cela est à mettre en parallèle avec l’augmentation des taux, la hausse des prix et potentiellement d’autres dispositifs sur le sujet de l’accession », lance Violette Martel, chargée d’étude pour l’Observatoire départemental de l’habitat, à l’occasion de la sortie du septième cahier de l’Agence départementale d’information sur le logement (Adil).

Pierre Convert et Éric Donetti, respectivement présidents de la Fédération du BTP et de la Capeb (Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment) de l’Ain, confirment : « Les derniers chiffres sur les mises en chantier dans le département sur 12 mois glissant ont enregistré une baisse de 8,8 %. Le pire concerne les autorisations de permis de construire, à -56 % », développe le premier.

« Le bassin Burgien a particulièrement souffert avec une baisse de 82 % du nombre de permis de construire. Cela impacte déjà les effectifs qui ont fondu de 20 % », renchérit le deuxième. La situation s’explique notamment par l’inflation et la remontée brutale des taux. Ces derniers diminuent la capacité d’emprunt des ménages, bien souvent amenés à changer de projet, voire à renoncer à l’achat ou la construction.

Si le marché de l’immobilier est déjà tendu, la situation pourrait encore empirer. En effet, dès 2025, les logements de classe G seront concernés par la loi sur les « passoires énergétiques », suivis par les logements de classe F en 2028 et ceux de classe E en 2034. Des mesures qui pourraient entraîner la sortie d’un certain nombre de logements du parc locatif, compte tenu du coût élevé d’une rénovation énergétique.

Crispation du marché

Le secteur de la construction pourrait, toutefois, y voir une échappatoire. « Une partie de la solution, pour sauver les entreprises, pourrait bien passer par la commande publique et par l’entretien-rénovation, qui représente à lui seul 55 % de l’activité du bâtiment, contre 45 % pour la construction neuve – dont seulement 25 % pour le logement neuf », explique Pierre Convert.

Même constat pour la Capeb pour qui les constructeurs ont la capacité de procéder à des réhabilitations et des rénovations énergétiques. « Il y a une volonté politique de massification dans ce domaine. La loi a été votée, mais décalée à juillet. Nous nous félicitons également du maintien du PTZ, mais nous demandons que l’État aille plus loin, en créant un prêt vert additionné de la possibilité d’étaler les finances sur trois à cinq ans. Le coût d’une rénovation énergétique globale est une vraie problématique. Or, nous travaillons avec des particuliers qui ne peuvent pas se passer totalement de leur logement pendant six mois. Si la personne demande à étaler les travaux sur deux ans, il n’est pas possible de lui imposer une massification sur six mois », précise Éric Donetti.

Le président de la Capeb alerte également sur le risque de fraude et d’usurpation, notamment avec le principe du démarchage à un euro. « Nous demandons l’instauration d’un système de contrôle approfondi », ajoute-t-il.

Un besoin sous-évalué

Si la décarbonation et les économies d’énergie sont nécessaires, pour Pierre Convert, il n’est pas possible d’occulter le logement neuf. « Sur certaines zones tendues, ils sont plus que nécessaires, avec une démographie en constante évolution. » De plus, toutes les sociétés ne seront pas en mesure d’adapter leur activité à la rénovation.

Pourtant, la situation devrait, là aussi, se complexifier. En effet, d’après l’Observatoire départemental de l’habitat, dans le cadre de la loi ZAN (Zéro artificialisation nette des sols) le nombre d’hectares consommés à destination de l’habitat en 2021 a diminué par rapport à l’année précédente sur le territoire. « Cette mesure nous contraint et nous fait perdre en visibilité sur le logement neuf », remarque Éric Donetti. Pierre Convert demeure toutefois optimiste, une baisse des taux pourrait de nouveau changer la donne.

En 2022, le poids des secteurs Val de Saône et Bresse (Veyle, Bresse et Saône, Grand-Bourg Agglomération) a représenté près d’un tiers des autorisations d’urbanisme délivrées dans l’Ain.

Évolution des prix

La Chambre des notaires de la Cour d’appel de Lyon s’est penchée sur l’évolution du marché dans l’Ain, sur la période du 1er novembre 2022  au 31 octobre 2023. Du côté des appartements anciens, le prix médian du mètre carré a augmenté de 4,1 % atteignant ainsi 2 600 €.

Pratiquement l’ensemble du département connaît des hausses, mais la périphérie burgienne et le Haut-Bugey s’inscrivent à la baisse. Le prix du mètre carré pour les appartements neufs montre une augmentation moins marquée avec +2,4 %. La ville de Bourg fait exception et voit ses prix chuter de 8 %.

Les maisons anciennes ne suivent pas cette tendance. Le prix de vente médian dans l’Ain, à 257 900 €, a connu en effet, une diminution de 0,1 %, entraîné par Bourg et sa périphérie, la Plaine de l’Ain, la Côtière et le secteur de Bellegarde-sur-Valserine. Le marché immobilier des maisons neuves est, lui, en net recul avec -5,5 %. Une situation qui ne concerne pas le Pays de Gex à +11,4 %.

– 30 % : En 2022, les autorisations d’urbanisme ont diminué de 30 % par rapport à l’année passée.

Le prêt à taux zéro en baisse

Le prêt à taux zéro (PTZ) n’a cessé d’évoluer depuis sa création en 1995. Après avoir atteint son apogée en 2010, avec près de 4 000 attributions dans l’Ain, il est désormais en chute libre. D’après l’étude de l’Observatoire départemental de l’habitat, en 2022, 823 PTZ ont été attribués, soit 131 de moins qu’en 2021. Les profils, eux aussi, ont évolué.

« En 2022, nous constatons une augmentation des bénéficiaires aux revenus plus élevés mais quand même éligibles. A contrario, certains profils deviennent moins nombreux comme les familles monoparentales, les personnes seules, les ménages de moins de 35 ans… Cela pose question », développe Violette Martelle, chargée d’études pour l’Observatoire.

Chacune de ces catégories voit le nombre d’attributions baisser de deux à six points. Des chiffres qui montrent une restriction à l’accession sociale, mais également une baisse des capacités d’emprunt malgré l’apport d’un PTZ.


Joséphine Jossermoz

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