Incinérateur de Passy : le préfet enterre les arguments des associations

par | 22 février 2019

Souvent pointé du doigt, l’incinérateur de Passy dresse un bilan de ses rejets sur ces dix dernières années.

«L’incinérateur est un faux problème », estime Étienne Jacquet, maire des Contamines-Montjoie et 2e vice-président de la communauté de communes Pays du Mont-Blanc en charge de l’environnement et de la santé. Données à l’appui. L’usine d’incinération gérée par Set Mont Blanc (filiale de Suez) vient de rendre publiques dix années d’analyses environnementales réalisées par l’institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris). Régulièrement décriée du fait des gros nuages de fumée qui s’échappent de sa tour, elle serait inoffensive. « 99,97 % de ses émanations ne sont que de la vapeur d’eau », explique Stéphane Barthe, directeur régional d’exploitation. « Faire croire que les vapeurs d’eau sont nocives, c’est un déni de réalité », ajoute Pierre Lambert, préfet de Haute-Savoie.

Contrôles renforcés

« Les taux de dioxine et furanes sont de 12 à 20 fois inférieurs aux taux réglementaires et sont analysés 50 fois par an », rappelle Stéphane Barthe. « Nous considérons que la protection des populations et de l’environnement est respectée. Faire croire que l’usine pollue et rejette des dioxines et du furane mortels pour la population, c’est une affirmation erronée que nous sommes en droit de contester », martèle Pierre Lambert. Le site effectue une autosurveillance en continu, ses échantillons sont analysés mensuellement et les prélèvements aléatoires effectués pour la direction régionale de l’environnement et de l’aménagement (Dreal) montrent que l’usine respecte l’arrêté préfectoral adopté après le passage de Ségolène Royal en février 2017.

Celui-ci renforce la réglementation nationale, et abaisse les taux de polluants tolérables pour la santé et l’environnement. Ainsi, le rejet de poussières est divisé par deux, soit 5 mg/m3, la concentration d’oxyde d’azote est abaissée à 80 mg/m3 (contre 200 auparavant) et la surveillance est étendue aux PCB-DL (assimilés aux dioxines) qui seraient 160 fois inférieurs aux maxima. Ils sont mesurés sur cinq milieux : sols, végétaux, lichens, retombées atmosphériques, et lait. Quant aux 13 métaux lourds analysés, « leurs valeurs sont estimées entre 16 et 45 fois inférieures à la réglementation en vigueur, tout cela n’est donc pas toxique », conclut Stéphane Barthe.

Pour les élus, l’usine respecte les normes réglementaires.

Inquiétude des associations

Des arguments qui ne convainquent pas, c’est le moins que l’on puisse dire, les associations environnementales riveraines. « On ne comprend pas pourquoi l’incinérateur est si protégé », s’indigne le collectif Air’pur présent sur le site lors de la conférence de presse avec une dizaine de personnes encadrées par les gendarmes. Le collectif est à l’origine de l’analyse indépendante “analytika” qui révèle des taux alarmants et au-delà des seuils réglementaires, mais celle-ci est contestée par l’Ineris pour sa méthodologie non scientifique. « Seuls une vingtaine de polluants sont analysés, alors qu’il existe plus de 2 000 substances toxiques sur le site », rappelle également l’association Inspire, militante depuis 22 ans pour un meilleur environnement dans la haute Vallée de l’Arve.

Les associations aimeraient voir le site fermer au bénéfice d’un véritable centre de tri. « Les sacs-poubelle noirs ne sont même pas ouverts avant d’être incinérés », se désole le collectif Air’pur. Le contrat de délégation de service public expirera en 2030. Même si le volume de déchets venait à diminuer grâce à un meilleur tri et une éventuelle mutualisation avec la déchetterie de Marignier, Stéphane Barthe ne craint pas l’avenir. « L’unité de valorisation énergétique compte investir, pour diminuer par deux le panache de fumée anxiogène, et développer les circuits de production d’électricité, ainsi que la méthanisation. Déjà 35 000 foyers sur Passy profitent de l’électricité produite par la déchetterie, une énergie verte qu’EDF fait cependant payer au prix fort », explique-t-il. On peut aussi se demander si le meilleur déchet ne serait pas celui que l’on ne produit pas.


Par Céline Hinniger

Cet article est paru dans votre magazine ECO Savoie Mont Blanc du 22 février 2019. Il vous est exceptionnellement proposé à titre gratuit. Pour retrouver l’intégralité de nos publications papiers et/ou numériques, vous pouvez vous abonner ici.

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