La nouvelle présidente régionale de l’UNAPL (Union nationale des professions libérales) s’intéresse de près au dialogue social, aux jeunes et à la formation. Elle annonce ses objectifs pour les trois années à venir. Interview.
Vous avez été élue, le 9 février, présidente de l’UNAPL Aura, quel est votre parcours professionnel et syndical ?
Originaire du plateau d’Hauteville, j’ai suivi des études de chirurgie dentaire à Lyon. Je voulais faire médecine et travailler de mes mains. Quand j’ai terminé mes études, j’ai été collaboratrice. Puis le praticien qui me suivait m’a vendu ses cabinets d’Artemare et Champagne-en-Valromey. Cela me convenait parfaitement, je suis fille de paysan et je n’avais pas envie de m’installer en ville. En 2000, j’ai eu l’opportunité de remonter sur le plateau d’Hauteville. J’ai fermé mon cabinet à Champagne pour travailler là-bas, jusqu’en 2019 où j’ai pris ma retraite.
Je suis originaire du milieu agricole, avec un père très engagé, responsable à la FNSEA et à la chambre d’Agriculture. J’ai un peu baigné dans le système dès ma petite enfance. Tout naturellement, je suis rentré au syndicat des chirurgiens-dentistes de l’Ain. Dans les années 1980, à l’époque la Convention nationale des syndicats dentaires, les Chirurgiens-dentistes de France (CDF) demandaient un responsable convention collective par département. J’ai voulu tenter l’expérience et je suis tombée dans le dialogue social.
En 1992, j’ai véritablement intégré le syndicat national, comme membre du groupe dédié à la fois au dialogue social et aux négociations de branche. Ensuite, j’ai enchaîné avec la commission pour l’emploi et l’organisme national de formation. En 2000, j’ai pris la responsabilité du service aux adhérents, puis en 2004, la vice-présidence aux affaires sociales et à la formation professionnelle des CDF, jusqu’en 2018. Depuis 2015, je suis membre du Comité économique et social Européen, au sein du groupe des employeurs, où je représente les professions libérales françaises. En parallèle, j’ai été déléguée à l’UNAPL, puis secrétaire générale, présidente de la commission des affaires sociales et enfin, présidente de l’UNAPL 01.
J’ai arrêté en 2022, mais j’ai finalement repris du service en tant que présidente régionale de l’UNAPL, tout en ayant la présidence de la commission paritaire régionale de l’opérateur de compétences des entreprises de proximité sous le mandat de l’Union des entreprises de proximité (U2P) et la vice-présidence de l’U2P Aura.
Quel est le rôle de l’UNAPL et de sa présidente ?
L’UNAPL est une intersyndicale de fédérations et de confédérations. C’est l’interprofession de l’exercice libéral. Elle représente environ 80 % des professions libérales françaises et de leurs salariés. Au niveau national, nous fédérons 69 organisations, dont une vingtaine de branches. Nous avons trois secteurs principaux : la santé, le droit, les métiers du cadre de vie et techniques, comme la maîtrise d’œuvre, les bureaux d’études… À ceux-là s’ajoutent les experts-comptables, les moniteurs de skis, les ostéopathes et une kyrielle d’autres professionnels. Au niveau régional, nous nous occupons de problèmes transversaux, comme la fiscalité, les problèmes de mobilité, le recrutement… En parallèle, nous relayons la politique nationale de l’UNAPL, au sujet des retraites, des impôts, des cotisations sociales des indépendants, etc. Nous nous occupons de nos entreprises régionales et transmettons les informations aux différentes organisations membres présentes sur le terrain. Par ailleurs, nous formons nos professionnels et les personnes qui souhaitent se lancer dans ces métiers. Nous agissons par le biais de nos organismes dédiés, les Oriff-PL.
Comment se portent les professions libérales ?
Le contexte n’est pas très bon, particulièrement pour le secteur de la construction. Le quatrième trimestre 2023 a été difficile et les perspectives ne sont guère meilleures. Fin 2022, 20 % des entreprises de proximité s’attendaient à une amélioration de la situation en 2023. Pour 2024, elles ne sont plus que 14 %. Ce qui maintient les chiffres, ce sont les professions de la santé et du droit. Les services aux entreprises, comme les professionnels du chiffre, sont, eux, en souffrance. Globalement, le moral n’est pas au beau fixe, même dans les secteurs qui ont du travail.
Quels sont les enjeux de la profession ?
Les jeunes générations ne travaillent plus comme les anciennes. Elles ne commencent pas le lundi matin en finissant le samedi, sans voir personne, ni conjoint, ni famille, ni amis. Ce temps-là est révolu. Les jeunes veulent des temps de vie. Ils demandent un peu de flexibilité et ont le droit d’avoir une vie personnelle. Il ne s’agit pas de se demander si c’est normal ou non, c’est la réalité du terrain. En tant qu’organisation professionnelle, nous devons l’anticiper. À titre personnel, je suis persuadée qu’un salarié bien dans son travail est plus productif, qu’il apporte une vraie valeur ajoutée à son entreprise.
Nous sommes également concernés par les transitions numériques et écologiques, notamment avec l’avènement des intelligences artificielles, la protection des données et la RSE. Il y a énormément à faire. D’ailleurs, nous travaillons sur ce sujet avec l’U2P et notre opérateur de compétences (Opco), au niveau national et régional. Tout le monde doit s’approprier ces grands enjeux, non pas futurs mais présents.
Quels sont vos objectifs de mandat ?
Nos organismes de formation doivent être remodelés. Celui que nous en avons en Auvergne fonctionne très bien. En Rhône-Alpes, c’est moins vrai. Nous devons donc remonter un véritable Oriff régional, avec un établissement auvergnat, vraisemblablement un autre à Lyon et si tout se passe au mieux, peut-être à Grenoble, pour être plus près des territoires.
De plus, nous voulons faire rayonner l’UNAPL en région et nouer des partenariats. Je souhaiterais notamment en instaurer un pour la jeunesse, mais par le biais des clubs sportifs incluant des centres de formation. Pourquoi ? Parce que tous les jeunes de ces centres ne finiront pas forcément en première division ou en Top 14. Il est important qu’ils puissent se réorienter après leur parcours, ce à quoi les centres sont attentifs. Ces profils, avec le sens du collectif, de l’endurance, de la méthodologie, sont intéressants et correspondent tout à fait au panel de métiers que nous proposons. Nous avons de gros secteurs en tension et donc un besoin de recrutement et de formation.
Enfin, les commissions paritaires régionales des professions libérales animent le dialogue social territorial. Instaurées en 2012, elles ont eu du mal à se mettre en place. Maintenant qu’elles sont là, il s’agit de les redynamiser, notamment en invitant à la discussion ceux qui n’étaient pas présents la première fois et sont représentatifs à 20 %. Nous avons trois ans pour atteindre ces trois principaux objectifs.
Bio express
- Août 1955 : Naissance à Hauteville
- 1978 : Diplôme de chirurgien-dentiste
- 1979 : S’installe comme dentiste et adhère au syndicat départemental des chirurgiens-dentistes de l’Ain
- Début des années 1990 : Devient présidente des chirurgiens-dentistes de l’Ain
- 2015 : Intègre le Comité économique et social Européen
- Février 2024 : Devient présidente régionale de l’UNAPL
Joséphine Jossermoz
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