La répétition des épisodes de canicule et de sécheresse, qui se sont cumulés cette année, pousse le secteur à interroger ses pratiques.
Déficit hydrique et fortes températures deviennent de plus en plus récurrents… Quand ils ne se cumulent pas, comme ce fut le cas cet été, formant un cocktail mortel pour le poisson. Pour en prendre la mesure, le conseiller régional Alexandre Nanchi a visité, le 10 août à Saint-Nizier-le-Désert, l’exploitation de Jean-Luc Payet-Pigeon, président de l’Adapra (Association de développement de l’aquaculture et de la pêche en Rhône-Alpes) et vice-président du Syndicat des étangs de la Dombes (photo ci-dessus). Une visite programmée tandis que se renégocie actuellement le contrat de filière. L’exploitant décrit une situation qui touche l’ensemble de l’aquaculture régionale. « En Dombes comme en Forez, nous avons eu un problème d’approvisionnement des étangs en eau, qui s’est matérialisé dès le printemps, avec un hiver déficitaire en pluviométrie. En Auvergne et en Ardèche, les élevages de truite ont beaucoup souffert. Il leur a manqué 50 % d’eau. Dans les lacs alpins, enfin, le poisson est descendu vers les profondeurs pour chercher une eau plus fraîche, passant sous les filets. »
En réponse à ces situations, la Région a pu apporter une aide conjoncturelle (125 605 euros pour 109 pisciculteurs en 2017 et 2018). « Mais, cela ne peut être qu’exceptionnel », rappelle Alexandre Nanchi. La filière doit s’adapter. Comment ? « En pêchant à grande eau, pour économiser la ressource, ne plus vider les étangs qu’à moitié et pêcher au filet, préconise Jean-Luc Payet-Pigeon pour la Dombes et le Forez. En tractant les filets à l’aide de quads, on doit pouvoir limiter le besoin en main-d’œuvre supplémentaire que cela suppose. Et une fois les poissons rabattus, il sera toujours possible de pratiquer la pêche traditionnelle. » Une autre solution consisterait à étaler l’empoissonnement et les pêches, pour moins peupler les étangs et étendre la saison de production, donc les capacités à alimenter les ateliers de transformation. De plus, le creusement de bassins de stockage en bordure d’étangs permettrait aux carnassiers, très sensibles aux hausses de température de l’eau, de trouver de la fraîcheur, ce qui limiterait la mortalité piscicole. Dans le Forez, de surcroît, on réfléchit à exploiter les eaux d’un canal voisin comme ressource complémentaire. « Le dossier est assez avancé, notamment les discussions avec la Chambre d’agriculture », assure Jean-Luc Payet-Pigeon.
Les pêcheurs des trois lacs alpins pour leur part, outre les phénomènes de canicule, ont un souci de gestion de la ressource. « Ils sont passés d’une production de 1 200 tonnes de féra à 600 tonnes par an, par manque de reproducteurs. Ils vont devoir laisser grossir le poisson, qui est très demandé. » Bref, de nombreuses pistes restent à discuter entre professionnels, notamment avec les agriculteurs, pour le partage de l’eau.
Face aux prédateurs
Le contrat de territoire Saône Dombes prévoit le financement des moyens de lutte contre les prédateurs du poisson. Dans ce cadre, la mise en place d’appareils de détection est expérimentée. Elle doit permettre de cibler les mesures d’effarouchement afin de limiter les effets d’accoutumance. Après que le Département de l’Ain a accompagné les premiers essais, la Région va être sollicitée à son tour, pour financer le prototype et le suivi des tests.
Par Sébastien Jacquart
Cet article vient en complèment du papier paru dans le magazine ECO de l’Ain du 5 septembre 2019 sur l’aquaculture face aux canicules et aux épisodes de sécheresse. Pour retrouver l’intégralité des articles de notre hebdomadaire, mais aussi de nos suppléments et hors-séries, c’est ICI.
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