Les syndicats d’enseignants des deux départements savoyards craignent une rentrée compliquée.
Cet article vient compléter notre “Grand Angle” consacré à la rentrée scolaire publié dans Eco Savoie Mont Blanc du 2 septembre 2022 et à retrouver en version papier ou dans notre liseuse en ligne.
Dans le premier degré comme dans le second, les syndicats d’enseignants s’inquiètent à deux jours de la rentrée scolaire. Tous craignent de devoir faire face à un déficit d’enseignants à plus ou moins long terme, malgré les mesures annoncées dans les deux académies.
En Savoie, François Coux, directeur d’académie, annonce avoir embauché 10 contractuels dont six étaient déjà présents l’an dernier. En Haute-Savoie, en plus des 55 équivalents temps pleins et des 175 stagiaires alloués pour cette rentrée, l’inspecteur prévoit quant à lui d’embaucher entre 20 et 30 contractuels, en fonction des constats de rentrée.
.
Ces cinq dernières années, on a eu l’impression d’être dénigrés constamment. Et nos salaires n’ont pas bougé depuis 15 ans alors que la charge de travail n’a fait que croître.
Benjamin Lombard, co-secrétaire départemental du SNUIPP-FSU 74
« Malgré cela, on part avec un déficit avant même la rentrée », calcule Emmanuel Fuss, secrétaire départemental du SE-Unsa 74. « En cinq ans, poursuit-il, le nombre de contractuels n’a fait qu’augmenter. Ce besoin d’enseignants n’existait pas auparavant. »
Avant, c’était avant les réformes Blanquer et avant les épisodes Covid qui, aux dires des syndicats, ont épuisé les professionnels. « Ces réformes ont dégradé nos conditions de travail », résume Sarah Hamoudi-Wilkowsky, secrétaire départementale de la FSU-SNUIPP 73. Plus de travail invisible et non rémunéré, plus de réunions, plus de paperasse et de moins en moins de considération : tout cela a, selon tous les syndicats, sapé le moral des troupes.
Au point de donner envie à certains de démissionner. Si seulement 9 l’ont fait en Savoie en 2021, ils étaient 41 en Haute-Savoie en 2019-2020 et 52 l’année suivante. Comment l’expliquer ? « Par le ras-le-bol, tranche Benjamin Lombard, co-secrétaire départemental du SNUIPP-FSU 74. Ces cinq dernières années, on a eu l’impression d’être dénigrés constamment. Et nos salaires n’ont pas bougé depuis 15 ans alors que la charge de travail n’a fait que croître. »
Revalorisation, espoir et inquiétude
Dans ce contexte, l’annonce, par le ministre de l’Education nationale Pap Ndiaye, d’une revalorisation du salaire à 2 000 euros nets en début de carrière dès septembre 2023, fait naître quelques espoirs, mais aussi d’autres inquiétudes : « Il faudra qu’il y ait également une répercussion sur les échelons suivants », martèle Benjamin Lombard.
Pour cette rentrée, la plus grosse incertitude porte, dans les deux départements, sur les remplacements. « Ce besoin de contractuels révèle en soi qu’on manque de titulaires et de remplaçants », note Sarah Hamoudi-Wilkowsky. « Les remplaçants titulaires sont utilisés pour faire des remplacements longs même si ce n’est pas leur vocation première, détaille François Lappe, secrétaire départemental du SE-Unsa 73. Du coup cet hiver, quand il y aura davantage d’arrêts maladie dus par exemple au Covid, cela va devenir compliqué à gérer. Les dix contractuels n’y suffiront pas. »
Les syndicats dénoncent en outre deux statuts différents pour exercer un même métier. Les uns sont fonctionnaires et les autres embauchés en contrat à durée déterminée, avec des salaires plus bas et une grande précarité.
Dans le second degré, Sylvain Lecomte, co-secrétaire départemental du SNES-FSU 74, prédit une rentrée difficile « comme les rentrées précédentes » avec un manque de personnel certain. « Au 22 août, il manquait, au niveau académique, 330 équivalents temps pleins, dont 170 en Haute-Savoie. » L’économie-gestion, l’allemand, les maths ou l’anglais sont les disciplines les plus touchées.
« Le métier manque d’attractivité du fait, entre autres, des salaires. On a de moins en moins de candidats au concours. » Là aussi, les contractuels ont fait leur apparition dans les salles des profs. « Certains ont déjà enseigné, d’autres ont juste reçu une formation expresse. Nous sommes inquiets d’avoir des enseignants formés face aux élèves. »
D’autant plus que le nombre d’élèves hautement perturbateurs augmenterait. « Face à eux, les enseignants sont déboussolés, explique François Lappe. C’est une grosse remise en question de leur professionnalité et cela occasionne beaucoup de dégâts. Au bout d’un moment, l’enseignant ne sait plus comment aider cet élève et comment préserver la classe. » Manque d’appui, manque de formation spécifique, manque d’AESH (accompagnant d’élèves en situation de handicap) viennent parfois au bout de la motivation.
0 commentaires