Seyssel et Seyssel sont éprises l’une de l’autre depuis des décennies, mais leur union est contrariée.
Distantes de quatre cents mètres par-delà le fleuve et l’emblématique pont à haubans qui les relie, les deux cités homonymes de Seyssel Ain et Seyssel Haute-Savoie réfléchissent « depuis au moins trente années à se rapprocher sur le plan institutionnel, c’est un sujet ancien», comme le reconnaît Christian Monteil. L’actuel président du Conseil départemental de la Haute-Savoie est (en binôme avec Virginie Duby- Muller) le conseiller départemental du (nouveau) canton de Saint-Julien-en-Genevois après avoir été le maire de Seyssel (74) de 1989 à 2008. Il en reste conseiller municipal et, à ce titre, sait combien l’attachement des deux collectivités tient de l’habitude de vie. « Nous avons quasiment tout en commun », soutient Michel Botteri, maire de Seyssel Ain : mêmes clubs de football et associations, même office de tourisme du Pays de Seyssel, même union commerciale et artisanale et même Communauté de communes Usses et Rhône depuis le 1er janvier 2017. Les deux villages n’auraient donc qu’un handicap : s’épanouir de part et d’autre du Rhône, dans deux départements distincts.
Handicap car leur souhait de ne faire qu’un bute sur cette géographie. Par une délibération adoptée en des termes identiques par les deux conseils municipaux, le 30 janvier dernier, les communes de Seyssel 01 et 74 ont demandé leur fusion en une commune nouvelle de Seyssel-sur-Rhône. Sauf que telle décision “trans-départementale” exige quitus des conseils départementaux. Là où la Haute-Savoie s’est déclarée favorable, le conseil départemental de l’Ain ne l’est point. Une telle fusion emporterait en effet vers la Haute-Savoie les 240 hectares de Seyssel Ain (plus petite que sa sœur haut-savoyarde), engendrant donc un redécoupage des limites départementales. « Pas question » répond en substance Jean Deguerry. «En qualité de président, je défends l’intégralité de mon département. Et pourquoi si je l’accepte pour Seyssel, devrais-je le refuser en d’autres lieux et communes ? J’ai pour engagement de conserver l’unicité de l’Ain», expose le chef de l’exécutif. Il l’a d’ailleurs affirmé en commission permanente, le 12 mars, comme l’avait déjà fait son prédécesseur en séance du 1er décembre 2015. Damien Abad avait alors donné suite à une première demande des deux collectivités territoriales de fusionner.
Sauf que cette position ne ravit nullement les maires des deux Seyssel. « Nous avons déposé un recours devant le Tribunal administratif contre le veto imposé par le Département de l’Ain, car cette délibération n’est pas motivée», prévient Michel Botteri. L’édile espère une réponse favorable sous un mois, une réponse qui reconnaîtrait «que nos habitants ne comprennent pas la coexistence de deux communes alors que notre bassin de vie est commun et que notre volonté s’inscrit dans le sens de l’histoire et des encouragements de l’État ».
Par Raphaël Sandraz
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