Dans son édito, Myriam Denis commente le soit disant “grand débat” animé par Cyril Hanouna, avec Marlène Schiappa.
Cyril Hanouna en tête d’affiche, Marlène Schiappa en guest star. Le présentateur/producteur, posé en pourfendeur des inégalités, pour la veuve et l’orphelin, a animé, le 25 janvier dernier, un grand débat en compagnie de la secrétaire d’État à l’Égalité entre les Femmes et les Hommes, laquelle jouait le rôle de “médiatrice”. C’est-à-dire qu’elle tentait d’écouter patiemment les arguments des uns et des autres, d’apporter des explications et de noter des idées sur un tableau. Le tout, dans une émission élégamment intitulée “Balance ton post, spécial grand débat”.
L’idée de départ, sobre et affichée, est de donner la parole aux Français dans le cadre de ce grand débat national, les écouter, et faire remonter sept propositions au Gouvernement, qui semble avoir besoin de ce genre d’initiatives, tellement déconnecté du terrain qu’il peut l’être. D’ailleurs, le président de la République aurait, via SMS, échangé avec le présentateur, quelque temps avant l’émission. Histoire de lui rappeler tout le bien qu’il pense de l’initiative.
Alors, effectivement, pourquoi ne pas bousculer les codes, lorsque cela est réalisé avec intelligence ? Le petit monde de la politique s’est pourtant assez largement montré hostile envers l’initiative de Marlène Schiappa, puisque l’idée est vraisemblablement son œuvre. Attaquée de toutes parts mais bonne joueuse politique – elle est dans son rôle – elle s’est posée en ardente défenseuse de l’idée, rejetant à la figure de ses détracteurs un “mépris de classe”. Je trouve l’argument un peu facile. De nombreux Français n’ont pas jugé pertinente une émission de divertissement, s’adressant principalement aux 15-24 ans, pour relayer leurs préoccupations. Mais, encore une fois, pourquoi pas, sur le fond ?
« DANS LE MICROCOSME DE LA TÉLÉRÉALITÉ POLITIQUE QUI NOUS OCCUPE ACTUELLEMENT, RIEN N’EST LE FRUIT DU HASARD ET JE NE CROIS PAS UN INSTANT À LA GRANDEUR D’ÂME D’UN CYRIL HANOUNA ET D’UNE MARLÈNE SCHIAPPA. »
J’émets pourtant des doutes quant aux motivations intrinsèques qui animent les deux personnages. « Nous avons été les premiers sur notre plateau, à faire venir des gilets jaunes », se targue à l’envi Cyril Hanouna. Et d’ajouter, d’un air docte : « Ce soir, ce n’est ni l’émission des chroniqueurs, ni celle de la ministre, ni la mienne, mais c’est votre émission », sous les applaudissements nourris du public. Et de rappeler que les téléspectateurs votent en direct pour retenir les propositions, les sept idées qui seront transmises au gouvernement. Merveilleux. Avec une Marlène Schiappa “objective”. Et sa désormais célèbre petite phrase : « Désolée Cyril, je vais le dire : On est dans un pays où l’on aime se plaindre ».
En réalité et globalement, j’exècre, littéralement, ce bouffon en veston, qui hypocrite des hypocrites, sous couvert de bonhomie et de “je vous ai compris”, se dit qu’il va probablement entrer dans l’histoire du petit écran. Car ne nous trompons pas : il s’agit d’un formidable coup de com’ pour les deux protagonistes. Lui, répétant au gré de ses multiples interviews qu’il a été le seul à donner la parole aux gilets jaunes de cette façon, elle, qu’il faut écouter la France, toute la France. Dans le microcosme de la téléréalité politique qui nous occupe actuellement, rien n’est le fruit du hasard et je ne crois pas un instant à la grandeur d’âme des deux personnages. Combien cette émission – ayant réalisé une forte audience – va-t-elle rapporter ? Surtout si d’autres suivent… C’est bien connu : le malheur des uns fait le business des autres !
Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.fr

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