Dans son édito, Myriam Denis met en doute les justifications du Gouvernement quant à la flambée des prix des carburants.
Ce lundi 5 novembre au matin, l’esprit encore embrumé du week-end prolongé, j’écoute comme chaque jour les infos en me préparant. Je cours dans mon appartement à la recherche d’une chaussette esseulée, plus ou moins bercée par la voix de Bruno Le Maire, interrogé sur la prochaine hausse des prix des carburants. Et là, je me fixe, tant le discours du ministre de l’Économie me paraît incongru : oui les prix à la pompe vont (encore) augmenter messieurs dames, il faut bien accompagner la transition écologique et par là même, la « conversion du parc automobile français ». Oui, le gouvernement prête une attention toute particulière à l’environnement, c’est sa priorité, etc. Bon dans le même temps, ledit gouvernement soutient Total, et son projet de forages dans les eaux territoriales de la Guyane, à la recherche d’hydrocarbures et ce, malgré l’avis défavorable d’une enquête publique environnementale. L’ONG Greenpeace a décrit cette zone « proche d’un écosystème unique et vulnérable ». Donc la volonté affichée de réduire les énergies fossiles vient juste d’en prendre un coup, et tant pis pour les coraux.
« EN ALLEMAGNE, LE PRIX DU GAZOLE HORS TAXES EST PLUS ÉLEVÉ, MAIS À LA POMPE COÛTE 9 CENTIMES DE MOINS. FISCALITÉ OBLIGE. »
En attendant, le projet de budget pour 2019 laisse entrevoir la note : une augmentation de l’ordre de 7 centimes pour le gazole (qui a déjà bondi de 5 % en un mois) et de 4 centimes pour l’essence. Le gouvernement caresse l’espoir que les Français voudront changer de véhicule, grâce à la prime à la conversion, et qu’ils s’orienteront naturellement sur des voitures plus récentes qui consomment moins. Je pense très sincèrement que si nous disposions tous du budget de Bruno Le Maire, nous serions effectivement nombreux à nous tourner vers l’achat d’un véhicule récent (quoique personnellement, je sois attachée à ma Mini de 2002). Les problématiques écologiques sont évidemment un enjeu crucial pour l’avenir de l’humanité, cela ne fait aucun doute. Ce qui m’interroge, c’est cette hausse continuelle qui semble surtout servir à renflouer les caisses de l’État. Le prix du gazole, par exemple, est déterminé par le prix hors taxe (0,65 euro), les taxes indirectes (0,61 euro) et la TVA (0,25 euro). Si l’on voyage un peu (quel luxe !), en Allemagne, le prix du gazole hors taxes est plus élevé, mais à la pompe coûte 9 centimes de moins. Fiscalité oblige. Le gouvernement, d’un ton docte, nous assène qu’il comprend bien que cela puisse être difficile « pour certains Français ». Oui, tous ceux qui ne résident pas dans une métropole pourvue de nombreux transports en commun. Ça en fait, des électeurs !
Ma chaussette attendra. Elle aura bien le temps d’être usée lorsqu’il faudra que je me rende au bureau à pied !
Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.fr
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