L’industrie serait-elle le parent pauvre de cette campagne présidentielle ? Il aura fallu attendre jusqu’à fin février pour qu’une poignée de représentants des principaux candidats – l’élite dans l’élite – ne se décident à formuler quelques promesses devant un parterre d’industriels issus des fédérations patronales de ce secteur. Vous n’en n’avez pas entendu parler ? C’est normal. L’industrie, ce n’est pas glamour aujourd’hui, dans l’imaginaire collectif. En témoigne la part qu’elle occupe dans le PIB français, passé de 22 à 12% en une quinzaine d’années. Sans compter les filières de formations qui ferment, laissant pantoises nombre d’entreprises qui peinent aujourd’hui à recruter.
Pendant ce temps, selon le tout dernier sondage Ipsos (oui, oui, il faut se méfier des sondages, veulent-ils toujours dire quelque chose, on se le demande, mais tout de même), selon ce sondage, donc, nous atteignons un pourcentage « inédit » d’indécis à quelques semaines de l’élection présidentielle. Ainsi, 34% des sondés ne sont pas sûrs d’aller voter. Parmi ceux qui se rendront jusque dans l’isoloir, ils sont nombreux à n’avoir pas encore arrêté leur choix. Et 65% des Français interrogés déplorent « l’absence de fonds de la campagne ».
Alors, peut-être les candidats vont-ils se souvenir de l’industrie, dans ces moments où ils partent tous azimuts à la conquête de précieuses voix. Car les opportunistes se rappelleront sans nul doute que des réserves de voix importantes existent du côté des ouvriers. Et des patrons. Comment faire pour draguer tout un pan de l’économie si souvent peu considéré ? Pourtant, si l’on prend un peu de distance, on s’aperçoit sans trop de difficultés que le Brexit et l’élection de Donald Trump reposent en grande partie sur la cristallisation politique d’un rejet de la désindustrialisation. Stratégiquement, il devient donc nécessaire de (re)donner ses lettres de noblesse à ce secteur économique pourvoyeur d’emplois et à la pointe de la technologie. Pour cela, il faudra lutter contre pléthore d’idées reçues et d’images désuètes. Rappeler que le secteur embauche, avec des conditions de rémunérations attractives, dans des métiers où l’innovation offre des opportunités nouvelles. Non, une reprise économique durable ne passera pas par une « tertiarisation » de notre société.
« ALORS, PEUT-ÊTRE LES CANDIDATS VONT-ILS SE SOUVENIR DE L’INDUSTRIE, DANS CES MOMENTS OÙ ILS PARTENT TOUS AZIMUTS À LA CONQUÊTE DE PRÉCIEUSES VOIX.«
Mais c’est également à l’industrie de se retrousser les manches et de lever l’opacité qui entoure encore parfois ses métiers. Ce qu’elle tente de faire. Elle parviendrait d’autant mieux à cet objectif si elle recevait peut-être davantage le concours de l’Education Nationale…
De leur côté, les pouvoirs publics ont tout leur rôle à jouer, ne serait-ce qu’en prenant la pleine mesure qu’accompagner l’installation d’entreprises, leur développement, leur compétitivité passe par des mesures fortes. En 2017, nous ne fabriquons en France pas plus de produits manufacturés qu’en 1996, alors que notre consommation de ces biens a augmenté de plus de 60%… Ce postulat est valable pour l’Hexagone. Car le reste du monde conçoit, fabrique et vend. Si aujourd’hui la France se hisse au neuvième rang industriel mondial, elle ne se situe, en montants, qu’au trentième rang international des investissements prévus dans de nouvelles usines. Et 65% des 144 principaux projets d’usines, lancés en 2016 par des entreprises françaises seront localisées… en dehors de la France. La désindustrialisation n’est pas un phénomène virtuel, il serait peut-être temps de changer de paradigme.
Myriam Denis
Rédactrice en chef adjointe
m.denis@eco-ain.fr
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