L’édito de Myriam Denis : « Poupées de chiffon »

par | 14 mars 2019

C’est une toute petite info, de la taille d’un mouchoir de poche, glissée en une col sur un quart de page du Monde. « Goldman Sachs autorise ses salariés à tomber le costume. »

Myriam DenisNon, n’imaginez pas que les banquiers et banquières d’affaires s’en iront au bureau dans le plus simple appareil. Simplement, l’établissement de Wall Street a informé ses 36 000 salariés que le dress code qui leur était jusqu’alors imposé, serait tempéré.

L’emblématique banque préconise « un code vestimentaire flexible », sans toutefois préciser si les cravates, costumes et tailleurs céderont la place aux shorts et minijupes en cuir. Il est permis d’en douter. Pourquoi donc se pencher sur ce détail qui pourrait sembler relever de l’anecdote “mode du moment” ?  

Parce que ce culte de l’uniforme professionnel et des gens neutres pourrait affecter le bien-être et la productivité des salariés, si l’on croit certaines études fort intéressantes parues sur E.RSE, plateforme dédiée à la responsabilité sociale des entreprises. Car finalement, peu d’analyses scientifiques mettent en avant le bien-fondé de telle ou telle pratique. Certains préféreront opter pour un dress code guindé, arguant que cela induit davantage de professionnalisme et de rigueur, lorsque d’autres voient dans une approche plus casual, l’occasion de laisser davantage place au libre arbitre et donc, à l’initiative. Les études conduites (surtout en Angleterre et aux États-Unis) démontrent le lien ténu entre la façon dont on s’habille et la façon dont on se perçoit (“la cognition incarnée“). Au-delà de l’aspect fonctionnel des choses, le dress code, ou son absence, influe sur un critère de plus en plus pris en compte dans les entreprises : le bien-être au travail. D’ailleurs, c’est finalement cet argument qui a convaincu Goldman Sachs d’assouplir ses règles : la concurrence des jeans/tee-shirts de la Silicon Valley, matérialisée par un Marck Zuckerberg, Facebookien particulièrement tendance, attire. Or, quand on a du mal à recruter, et que le patron est par ailleurs DJ, on fait bouger les lignes.

« LA CONCURRENCE DES JEANS/TEE-SHIRTS DE LA SILICON VALLEY, MATÉRIALISÉE PAR UN MARCK ZUCKERBERG, FACEBOOKIEN PARTICULIÈREMENT TENDANCE, ATTIRE. »

En même temps, par 38°, sans un semblant de zéphyr à l’extérieur, avec un pauvre vieux ventilo usé dans l’open-space… On peut plaindre nos homologues masculins obligés de revêtir pantalons, chaussures fermées et chaussettes, voire, dans certaines sociétés, la veste, alors que nous exhibons petons et gambettes, le minimum syndical sur le corps pour affronter la chaleur tropicale du bureau. C’est ça, l’égalité des sexes ? Dans mon parcours, j’ai eu travaillé pour un groupe de presse nationale qui n’admettait, pour les femmes, que la jupe, a minima, au genou. Peu flatteur pour le moral !

Évidemment, il faut savoir rester cohérent avec son poste. Zola, dans son magnifique roman Au bonheur des dames, écrivait que pour vendre de la soie, il fallait porter de la soie. Même dans le langage courant, on évoque les cols blancs en opposition aux bleus de travail.

Certes. On pourrait objecter que l’habit ne fait pas le moine. Tout en comprenant qu’il permet bien d’entrer au monastère ! Mais s’engoncer dans le carcan du “bon goût“ obligatoire, relève finalement du même travers que la dictature du cool. Mais nous ne sommes pas des poupées de chiffons, obéissant à des règles strictes sans réfléchir. On nous dicte déjà quoi manger (ou pas), quel sport choisir (ou pas)… Peut-être que la RSE commence là : laisser un peu de latitude aux gens pour déterminer leurs propres choix.

Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.fr

 

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