Les commissaires aux comptes inquiets

par | 03 mai 2018

La loi Pacte portée par Bruno Le Maire est loin de ravir la branche des professions libérales, « seule sentinelle au sein de l’entreprise », d’après Olivier Arthaud, président de la CRCC de Lyon.

«Nous sommes très mobilisés car cette loi est complètement inadaptée et incohérente. De plus, elle aura de fortes conséquences sur l’économie des cabinets et entraînera 11 000 licenciements au niveau national. En Auvergne-Rhône-Alpes, près de 400 confrères sur 900 sont menacés de perdre leur emploi », s’indigne Olivier Arthaud, le président de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes (CRCC). Les raisons de son agacement ? Le Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, abrégé Pacte, à l’intiative de Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances. Ce dernier avait évoqué les contours de la loi à l’automne 2017, comprenant la révision du seuil d’intervention des commissaires aux comptes dans les entreprises réalisant au moins 8 millions d’euros de chiffre d’affaires, et non plus 2 millions d’euros, le seuil historique. Les mandats des auditeurs au sein des PME se retrouveraient donc compromis.

Transformer l’économie ?

« Notre rôle n’a cessé d’être renforcé par le législateur au gré des scandales financiers, justifie Olivier Arthaud. Aujourd’hui, nous assistons à un début de reprise, et le Gouvernement avance sur la simplification en s’alignant sur l’Union Européenne et le tissu économique allemand.» Problème, l’Allemagne compte bien plus

CONSEIL

Fiabiliser les audits, valoriser les expertises et les analyses, les commissaires aux comptes visent à apporter des avis éclairés aux chefs d’entreprise.

d’ETI avec une moyenne de 150 salariés, quand les PME françaises soutiennent l’économie. Ainsi, les commissaires aux comptes considèrent que la loi Pacte n’est pas en adéquation avec la réalité du terrain. Pour l’heure, le texte qui n’est pas encore au stade de projet de loi, devrait être présenté en conseil des ministres courant mai. Dans les faits, le Gouvernement souhaite favoriser l’innovation, l’exportation et la création d’emploi du côté des PME.

En attendant, la loi Pacte annoncée comme un moyen de « transformer l’économie pour donner une nouvelle armature » aux entreprises françaises, selon les mots du ministre, provoquent des sueurs froides parmi les auditeurs. Si les commissaires aux comptes ont été associés à la vaste consultation pour l’élaboration du projet de loi, force est de constater que leur voix n’a pas été prise en compte. « On nous tire une balle dans le dos en supprimant 80% de notre activité », insiste Olivier Arthaud. La branche professionnelle se dit prête à accepter de doubler ses seuils d’audit, de 2 à 4 millions d’euros, en proposant une mission adaptée pour diminuer les coûts pour les entreprises enregistrant entre 4 et 8 millions d’euros de chiffre d’affaires. Une réduction des honoraires étant envisagée.

UN AGENDA POLITIQUE CHARGÉ

Initialement prévu pour être présenté en conseil des ministres le 18 avril, le Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises sera finalement dévoilé le mois prochain.
Un décalage notamment expliqué par les tensions avec les différents lobbys professionnels : le texte prévoit de soutenir les entreprises et d’associer les salariés à leurs résultats. Surtout, Pacte n’est pas mentionné parmi les promesses de campagne d’Emmanuel Macron. Et sur ce point, les réformes
de la SNCF ou constitutionnelles, apparaissent comme prioritaires. La famille des commissaires aux comptes a prévu une manifestation nationale le 17 mai.

Par Sarah N’tsia

Cet article est paru dans ECO Nord Isère du 27 avril 2018. Il vous est exceptionnellement offert à titre GRATUIT. Pour retrouver l’intégralité des articles de notre hebdomadaire mais aussi de nos suppléments et hors-séries, c’est ICI

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