Les professions du droit et du chiffre se sont pliées au traditionnel exercice d’analyse de la loi de Finances.
Si la loi de Finances 2019 n’est pas parmi les plus riches, elle a déjà été beaucoup commentée, puisqu’elle contient un certain nombre de mesures décidées en réponse au mouvement des gilets jaunes : prime exonérée d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales jusqu’à 1 000 euros par salariés (dont les entreprises pouvaient décider jusqu’à ce jeudi 31 janvier), retour à une CSG à 6,6 % pour les retraités touchant moins de 2 000 euros nets mensuels et exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations salariales des heures supplémentaires et complémentaires dans la limite annuelle de 5 000 euros. Nonobstant, la Chambre des notaires de l’Ain, l’Ordre des avocats, l’Ordre des experts-comptables et le Crédit Agricole Centre-Est se sont livrés au traditionnel exercice d’analyse et de commentaire du texte, jeudi 31 janvier à l’Espace Kennedy du Crédit Agricole. Une soirée, la 28e du genre, animée par l’Eco de l’Ain, où les intervenants ont pu s’attarder sur les autres mesures, moins connues, notamment pour celles qui concernent les entreprises.
Crédits d’impôts
Cette loi de Finances 2019 voit notamment la transformation en baisse de charges pérennes, des crédit d’impôts compétitivité emploi (CICE) et crédit d’impôts de taxe sur les salaires (CITS), remplacés par une réduction de six points du taux de cotisation patronale d’assurances maladie-maternité-invalidité-décès jusqu’à 2,5 Smic. « L’avantage sur un crédit d’impôt est que cette baisse est immédiatement applicable. Son inconvénient est de générer du résultat supplémentaire, donc de l’impôt supplémentaire », a commenté l’expert-comptable Emmanuel Dalloz.
Le régime d’intégration fiscale qui permet à un groupe de sociétés, de faire supporter l’impôt à une seule d’entre elles, en équilibrant les pertes et les bénéfices de chacune, a fait l’objet d’une mise en conformité avec le droit communautaire qui, selon Emmanuel Dalloz, lui fait perdre beaucoup d’intérêt. « Cet avantage donné aux groupes déplaisait à Bruxelles. Il est donc mis fin à la neutralisation de la quote-part de frais de charges de 12 % sur les cessions de titres de participations. Et les subventions directes et indirectes entre sociétés ne sont plus neutralisées. Il va donc falloir surveiller ces opérations de près », a-t-il détaillé.
Parmi les mesures diverses, si les dépenses de mécénat ouvrent droit à une réduction d’impôts de 60 %, celles-ci seront retenues, pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2019, dans la limite de 10 000 euros ou de 5 ‰ du chiffre d’affaires. Par ailleurs, les entreprises qui mettent gratuitement à la disposition de leurs salariés, une flotte de vélo, peuvent déduire de l’impôt sur les sociétés, 25 % du prix d’achat ou du loyer de ladite flotte. Enfin, un suramortissement de 40 % des équipements robotiques et de transition numérique neufs est mis en place pour les PME au sens européen, « y compris pour les locations avec option d’achat », précise Emmanuel Dalloz.
Liberté fiscale
L’avocat Pierre-Emmanuel Thivend, enfin, a commenté la loi Essoc, censée répondre à une volonté de Bercy de faire confiance et de faire plus simple. S’il a salué comme une réelle avancée, le fait que « tous les points examinés par le vérificateur au cours d’un contrôle, même ne faisant pas partie d’une rectification fiscale, seront considérés comme validée par l’administration si celle-ci a pu se prononcer en toute connaissance de cause », il s’est montré plus réservé sur les autres mesures : instauration d’un recours hiérarchique dans le cadre d’un contrôle sur pièces, création d’une police fiscale au sein du ministère du Budget, mise en place du “name and shaming” pour les fraudes d’au moins 50 000 euros commises par des personnes morales et sanctions contre les professionnels du droit et du chiffre considérés comme complices. « D’une loi de Finances à l’autre, l’administration prend des dispositions pour réduire la liberté fiscale. »
« Un système à bout de souffle »
« On enseignait à une époque qu’un bon système fiscal devait répondre à deux principes : financer le service public de manière équilibrée et non confiscatoire, être suffisamment compréhensible et simple pour permettre l’action économique. Force est de constater que ces conditions ne sont plus réunies. Nous faisons face à un système à bout de souffle, compliqué, instable, trop lourd, qui incite davantage à fuir qu’à investir », a conclu le bâtonnier du barreau de l’Ain, Jacques Bernasconi, en clôture de cette soirée Loi de Finances 2019.
Par Sébastien Jacquart
Cet article est paru dans ECO de l’Ain du 7 février 2019. Il vous est exceptionnellement proposé à titre GRATUIT. Pour retrouver l’intégralité des articles de notre hebdomadaire mais aussi de nos suppléments et hors-séries, c’est ICI
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