Center Parcs Roybon : on en est où au fait ?

par | 04 juillet 2018

La décision du tribunal administratif de Lyon d’annuler le budget primitif 2016 de la Région Rhône-Alpes Auvergne a remis indirectement un coup de projecteur sur le Center Parcs prévu à Roybon. L’occasion de refaire le point sur ce grand projet, pour lequel les décisions de justice s’enchaînent aussi.

C’est une « autorisation de programme » (une enveloppe financière) de 4,7 M€ en faveur du projet Center Parcs de Roybon qui a provoqué l’annulation du budget primitif 2016 de la Région Auvergne-Rhône-Alpes par le tribunal administratif de Lyon, le 22 mai.

Et si le flou demeure sur les suites de cette « autorisation de programme » (lire en bas d’article), c’est aussi un peu l’inconnu en ce qui concerne le devenir du projet.

Eco fait le point pour vous sur ce dossier à 400 M€.

Le cadre du projet LE CADRE DU PROJET

Le projet de Center Parcs de Roybon a été lancé en 2008 par le groupe Pierre&Vacances – Center Parcs (PVCP ; lire ci-dessous la présentation et le bilan du groupe). Il se situe au sein du massif des Chambaran (sans « S » à la fin), qui s’étend, à une altitude de 500 à 700 m, sur 35 000 hectares au cœur d’un triangle Lyon-Grenoble-Valence. C’est-à-dire au sud ouest de l’Isère, à la frontière avec la Drôme mais pas très loin non plus de l’Ardèche, de la Loire et du Rhône.

Selon le promoteur, ce projet prévoir la création d’hébergements et d’activités touristiques sur un site de 150 hectares dans un environnement majoritairement boisé. Sur ces 150 hectares, toujours selon le promoteur, 80 hectares seraient défrichés et 35 « à imperméabiliser ». Le groupe PVCP insiste : 150 hectares, c’est « 0,42% des 53 000 hectares du massif forestier des Chambaran »

En outre, 76 hectares de zones humides seraient détruits, « compensés à plus de 200% » (un hectare impacté = 2 hectares restaurés). Des chiffres contestés par les opposants, qui parlent de plus de 110 hectares de zones humides impactées en se référant à « l’expert de l’enquête publique ». Et qui soulignent que la loi sur l’eau impose que les compensations aient lieu sur le même bassin versant, ce qui n’était pas le cas dans le dossier soumis à enquête publique. Il y a donc eu un recours en justice sur ce point (et d’autres recours sur d’autres point, lire ci-dessous).

Le projet est situé au milieu d’un triangle Lyon-Grenoble-Valence, Saint-Etienne à l’ouest et Chambéry à l’Est n’étant pas non plus très éloignées. Crédit : image Google Maps.

Ce qu’il y a dans le projet

Le site mis en place par le groupe Pierre&Vacances – Center Parcs et service communication du groupe que nous avons interrogé annoncent :

*Un domaine piétonnier de 150 hectares dont 80 défrichés

*990 cottages « certifiés Haute qualité environnementale (HQE) » de 54 à 170 m² habitables

*Plus de trente activités de sports et de loisirs intérieures et extérieures (parcours dans les arbres, tir à l’arc, vélo, mini-golf… ) dont un espace aqualudique (bassins, jeux d’eau, piscine, toboggans, rivière sauvage…)

*Des restaurants, boutiques et commerces

*Près de 700 emplois directs en phase d’exploitation, à 85% en CDI, pour 468 équivalent temps plein

« L’ensemble des équipements (espace aquatique + SPA, restaurants et grande serre, centre de séminaires…) représente une surface de près de 30 000 m2. Les restaurants et la grande serre : plus de 13 000 m² », nous précise le groupe.

Des chiffres là encore souvent contestés ou relativisés par les opposants. Notamment en ce qui concerne les emplois. L’association Pour les Chambaran sans Center Parcs (PCSCP ; http://pcscp.org) estime que « sur les 700 emplois annoncés, la moitié sera des temps partiels autour de 10 heures par semaine. »

L’association fustige aussi « le coût exorbitant de 239 000 € [de subventions publiques] par emploi créé ! Soit 15 fois plus qu’un emploi d’avenir » ou encore l’équivalent d’« environ 10 années de salaire payés d’avance par les contribuables, charges salariales et patronales incluses. »

De multiples recours en justice

Ces différences de vues sur les chiffres et donc la nature du projet ont conduit à plusieurs recours en justice de la part des opposants.

L’un de ces recours portait sur l’autorisation de construire une canalisation d’évacuation des eaux usées de 27 kilomètres passant à proximité de terrains sensibles (site d’importance communautaire). Validée par le tribunal administratif, cette autorisation a été annulée par la cour d’appel de Lyon le 16 décembre 2016. Et le Conseil d’Etat a rejeté, le 13 octobre 2017, la demande de cassation déposée par le promoteur.

Un autre recours porte sur les compensations pour la suppression de zones humides : le tribunal administratif comme la cour d’appel (toujours le 16 décembre) ont estimé que ces compensations n’étaient pas adaptées et notamment trop éloignées de la zone d’impact. Sur ce point le Conseil d’Etat doit encore statuer Center Parcs l’a saisi en février 2017).

Toutefois, tout n’est pas perdu pour les partisans du projet. Dans un autre arrêt, toujours en date du 16 décembre 2016, la même cour d’appel administrative de Lyon a donné raison aux défenseurs du Center Parcs.

Elle a estimé que le Préfet de l’Isère n’avait pas, dans son arrêté accordant dérogation pour la destruction d’espèce protégées, commis d’erreur d’appréciation : la surface du parc représente une faible superficie rapportée à celle de l’ensemble de la forêt de Chambaran, les espèces protégées en question sont plutôt communes et pas menacées d’extinction et il y a des mesures compensatoires de prévu.

Pour fonder son arrêté le préfet avait considéré que le projet était justifié par des raisons impératives d’intérêt public majeur. C’est vrai, a estimé la cour, vu qu’il doit créer plus de 600 emplois pérennes à terme et plus de 1 000 pendant les deux ans de chantier avec près de 400 M€ d’investissement au total (chiffre que nous a confirmé le groupe Center Parcs).

Le tribunal administratif de Grenoble a été saisi plusieurs fois par les opposants au projet Center Parcs de Roybon. Depuis, le dossier est monté jusqu’en cassation et au Conseil d’Etat.  Crédit photo : Eric Renevier.

La chronologie du projet

2008
Lancement des études

2013
Les autorisations de défrichement sont définitivement validées par le Conseil d’Etat.

Octobre 2014
Arrêtés du préfet de l’Isère relatifs à l’application dans le projet de la réglementation sur espèces protégées et de la loi sur l’eau. Les opposants saisissent la justice.

Novembre 2014
Installation des zadistes sur le site pour empêcher la poursuite du défrichement. Ils y sont toujours.

Juillet 2015
Après un premier épisode formel en référé, le Tribunal Administratif de Grenoble se prononce sur le fond et valide l’arrêté préfectoral relatif aux espèces protégées mais annule celui relatif à la loi sur l’eau. Chaque partie fait appel dans le dossier où elle n’a pas gagné.

Décembre 2016
La cour d’appel administrative de Lyon confirme les deux décisions du TA de Grenoble : validation de l’arrêté espèces protégées mais annulation de l’arrêté loi sur l’eau. Le groupe P&V – Center Parcs se pourvoit en cassation en février 2017 : la décision est toujours en attente.

2018
Le Tribunal administratif de Lyon annule le budget primitif de la Région Aura à cause de l’autorisation de programme de 4,7 M€ en faveur du projet de Center Parcs Roybon (manque d’information préalable aux élus). Mais le compte administratif, qui comprend cette autorisation de programme, lui, demeure bien valide.

Bref, on ne sait pas si cette cette « AP » reste juridiquement valide ou si elle devra faire l’objet d’une nouvelle décision de la Région.

En attendant, le projet est toujours à l’arrêt tant que le Conseil d’Etat ne s’est pas prononcé sur l’arrêté préfectoral relatif à la loi sur l’eau. Et les zadistes occupent toujours le site.

L’imbroglio sur la subvention régionale de 4,7 M€

Le tribunal administratif de Lyon, a donc annulé, le 22 mai, le budget primitif 2016 de la Région Auvergne-Rhône-Alpes.

Après avoir un temps pensé à procéder à un nouveau vote purement formel lors de l’assemblée plénière des 14 et 15, la Région a finalement préféré consulter la préfecture (contrôle de légalité) pour trouver une solution de régularisation de la situation : celle-ci devrait être connue à l’automne.

Problème : si le budget primitif (prévisionnel) a été annulé, le compte administratif qui valide le budget réellement réalisé reste, lui, bel et bien en vigueur.

Du coup, impossible à l’heure actuelle de savoir si la fameuse autorisation de programme de 4,7 M€ est toujours valide ou non…

Le promoteur du projet : le groupe  Pierre & Vacances – Center Parcs

Pierre&Vacances – Center Parcs (PVCP) est un opérateur touristique bien connu en Rhône-Alpes, où il exploite déjà de nombreux hébergements en station, notamment à Avoriaz, station co-fondée par Gérard Brémond, le pdg de PVCP).

Dans la région, le groupe Pierre & Vacances est déjà bien implanté en stations. Crédit photo : Groupe Pierre & Vacances Center Parcs.

En 2016-2017, le groupe, qui fêtait ses 50 ans (création en 1967), a réalisé un chiffre d’affaires d’un peu plus d’1,5 milliard d’euros (1 506,3 M€), en hausse de 5,8% (+4,9% à périmètre constant). Outre 203,7 M€ réalisé dans le « développement touristique » (constructions et extensions de sites), ce chiffre d’affaires s’équilibre presque à parité entre Pierre & Vacances (637,9 M€) et Center Parcs (664,7 M€).

Dernier bilan négatif mais activité en hausse

Le résultat net de l’exercice 2016-2017 de Pierre&Vacances – center Parcs affiche une perte de 56,7 M€. Mais c’est en raison de circonstances exceptionnelles, explique le groupe : demande de conversions anticipées d’obligations (29 M€), ouverture de Villages Nature Paris, le nouveau Center Parcs situé près d’Euro disney, à Bailly-Romainvilliers (investissements, retards, surcoûts immobilier ; le tout pour 36 M€). Hormis ces facteurs non récurrents, le résultat net serait positif. Le résultat opérationnel courant, lui, est excédentaire de 12,4 M€ (toutes activités confondues).

Pour le premier semestre de l’exercice 2017-2018, il affiche 654,8 M€ de chiffre d’affaires, en hausse de 6,8% sur un an.

Le groupe PVCP est actif sous les marques Pierre & Vacances, Center Parcs, Sunparks, Aparthotels Adagio et Maeva (il possède les résidences Sénioriales). Il emploie 12 200 salariés et a accueilli sur 2016-2017 environ 8 millions de clients dans ses 45 000 appartements et maisons, situés dans 277 sites en Europe. De quoi revendiquer le titre de « leader des résidences touristiques et des resorts en Europe. »

A lire aussi :

La justice annule le budget de la Région Auvergne-Rhône-Alpes

Avoriaz : 50 ans… et après ?

Center Parcs Roybon : le Conseil d’Etat tout prêt de rejeter le recours

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