La sortie du pic inflationniste n’est pas attendue avant fin 2023. En France et en Suisse, deux visions s’affrontent : une politique plus axée sur l’assistance aux plus modestes côté français et des mesures qui font davantage appel à la responsabilité de la population et de l’État côté helvète. Décryptage.
Le président Emmanuel Macron, élu en avril dernier, n’a pas placé la hausse du pouvoir d’achat des Français au coeur de son programme, alors qu’il s’agit de la préoccupation principale de la population. Depuis des mois, le prix des carburants dépasse allègrement les 2 euros et la réduction de 18 centimes par litre accordée par le gouvernement depuis le 1er avril et prolongé au-delà du 31 juillet n’a eu que de faibles effets.
Selon Emmanuel Macron, la réponse à la problématique du pouvoir d’achat passe par le plein emploi. Fin juillet, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture un projet de loi d’urgence sur le pouvoir d’achat sur une proposition de la majorité présidentielle, renforcé par l’apport des voix des députés du groupe Les Républicains (LR) et du Rassemblement national (RN).
Le projet de loi a fait l’objet de vifs débats, la Nouvelle union populaire économique et sociale (Nupes) rassemblant les partis de gauche dénonçant une « déclaration de guerre aux salaires », le projet ne prévoyant pas de hausse du SMIC. Le texte doit notamment répondre à l’inflation et à la crise énergétique causée par la guerre en Ukraine. Les pensions de retraites et plusieurs allocations doivent être notamment augmentées de 4 %.
La hausse du coût de l’énergie a eu des répercussions sur les produits alimentaires, un phénomène accentué pour certaines denrées par le conflit en Ukraine.
Réduire la dette
Côté Suisse, les actions préconisées diffèrent. « Il y a plusieurs méthodes au premier rang desquelles je citerais l’indexation des salaires, constate Pascal Broulis, ancien membre du gouvernement vaudois, en charge des finances du canton de 2002 à 2022. On peut aussi dévaluer la monnaie, ce qui améliore les exportations mais nuit à la consommation en renchérissant les biens importés.
Quant à la distribution d’argent, « l’argent hélicoptère », c’est un moyen déconseillé. Si cela crée une grosse demande, c’est aussi un risque d’inflation et si l’argent est thésaurisé, cela ne sert à rien. » Il nuance son analyse de l’inflation en estimant que tout dépend de son niveau.
« Une inflation modérée peut être considérée comme saine. Elle améliore le pouvoir d’achat et atténue le problème de la dette. La Banque nationale suisse (BNS) a parmi ses objectifs une inflation de l’ordre de 2 % par an, chiffre qui n’a plus été atteint depuis longtemps. En revanche une inflation excessive crée des tensions sur le pouvoir d’achat et génère des difficultés pour les investissements. La force du franc suisse protège partiellement le pays de hausses générales trop importantes. »
Il défend avant tout des mesures préventives : « Il faut que les États s’efforcent d’avoir toujours la dette la plus petite possible, ce qui leur donne une force de frappe pour investir, amortir les anciens investissements et moderniser le pays. »
« C’est d’abord la politique des taux. La BNS sort tranquillement de l’ère des taux négatifs. C’est aussi le resserrement de l’accès au crédit : une masse monétaire trop abondante est un facteur évident d’inflation. Cela reste toutefois un outil délicat à manier car une diminution trop importante risque de casser la consommation et de mener à la stagflation. »
Pascal Broulis, membre du gouvernement vaudois, en charge des finances du canton de 2002 à 2022
Sandra Molloy
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