Les assureurs doivent-ils garantir les pertes d’exploitation dues aux fermetures administratives ? Les imprécisions des clauses d’exclusion conduisent le débat devant les tribunaux de commerce aux décisions assez contradictoires en ce qui concerne les restaurateurs.
Thomas Mugnier, hôtelier-restaurateur basé aux Gets, a obtenu gain de cause en fin d’année 2020 : Axa, qui a fait appel, a été condamnée à l’indemniser pour les pertes subies à cause du coronavirus. De quoi faire jurisprudence pour ce type de contrat ? Les deux parties nous répondent : Axa par un communiqué officiel, l’hôtelier-restaurateur par l’intermédiaire de ses deux avocats de Thonon-les-Bains.
La position officielle d’Axa communiquée à Éco : « Les mesures généralisées étaient exclues »
« AXA France a décidé de faire appel du jugement du tribunal de commerce d’Annecy et il reviendra par conséquent à la cour d’appel de Chambéry de se prononcer sur ce cas. En effet, le contrat ne prévoit aucunement la prise en charge des pertes d’exploitation en cas de fermeture collective d’établissements au sein d’un même département pour la même cause. La situation que nous vivons aujourd’hui avec cette pandémie de Covid-19 correspond totalement à cette hypothèse puisqu’il est possible d’évoquer des mesures généralisées qui s’appliquent à plusieurs établissements. AXA France, préoccupée par l’ampleur des conséquences économiques qui font suite aux mesures administratives décidées par les pouvoirs publics pour des raisons sanitaires, s’est engagée, par des contributions significatives, à soutenir autant qu’il lui est possible ses assurés. »
Maîtres Quentin Mugnier et Frédéric Noetinger- Berlioz, avocats : « Clauses d’exclusion peu apparentes et trop larges »
« Nous avons soulevé des irrégularités de forme : la clause d’exclusion de garantie n’était pas visible dans le contrat et n’apparaissait donc pas comme telle. Elle doit être encadrée, en gras, en rouge…. selon le code des assurances. Le tribunal d’Annecy, qui a bien relevé la forme négative, a réaffirmé qu’il s’agissait d’une clause d’exclusion et l’a jugée nulle et non avenue. Nous avons aussi argumenté sur le fond : si la clause avait été jugée valable, il suffisait qu’un autre établissement de la région – ou même au niveau national – subisse une fermeture administrative, pour cause de tapage nocturne par exemple – puisqu’aucune cause n’était précisée –, et Axa estimait alors qu’il s’agissait d’une fermeture collective et que, par conséquent, la garantie était exclue. Suite au rendu, des avenants à signer ont été envoyés aux assurés : il y est explicitement précisé, en gras, que le risque pandémique est exclu de la garantie… »
Propos recueillis par Julien Tarby
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