L’édito de Myriam Denis : « #6novembre15h35 »

par | 15 novembre 2018

Comment ? Encore un sujet sur les inégalités salariales entre hommes et femmes ? Et bien… oui.

Myriam Denis

Tout travail mérite salaire, nous en conviendrons tous et toutes. Et pourtant, selon la communauté Les Glorieuses, depuis la date fatidique du 6 novembre 2018 à 15h35, les femmes en France travaillent pour… rien. Une autre conception du bénévolat ?

Loin de là ! Il s’agit d’une manière plutôt symbolique d’attirer l’attention sur une réalité bien concrète : s’appuyant sur les données fournies par Eurostats, l’association démontre qu’il persisterait 15,2 % d’écart de salaire entre hommes et femmes en France (16,2 % en Europe). Ce qui représente presque deux mois d’activité sur l’année, expliquant cette invitation faite aux femmes de cesser le travail le 6 novembre.

En données plus affinées, l’association Les Glorieuses avance plusieurs autres chiffres : la différence de salaire s’élève à 9 % entre hommes et femmes « à travail égal, en prenant en compte les tranches d’âges, le contrat, le temps, le secteur d’activité et la taille de l’entreprise ». Enfin, selon les chiffres les plus récents de l’Institut national de la statistique (Insee), qui remontent (tout de même) à 2015, toutes catégories confondues, « les salaires des femmes sont inférieurs de 23,7 % à ceux des hommes ». La discrimination pure serait d’environ 10 %, selon le ministère du Travail.

Que doit-on retenir de ces savants calculs ? Que si la situation semble s’améliorer (l’année dernière, la date retenue était celle du 3 novembre, nous avons donc légèrement progressé, si l’on veut considérer le verre à moitié plein), il faudra attendre environ 150 ans, pour atteindre l’égalité, la vraie. Mais celle-ci est-elle véritablement un but à atteindre ? Comment ne pas confondre justice, équité et égalité ? En effet, si nous suivons le raisonnement selon lequel une femme gagne sur tout poste moins que son homologue masculin, les entreprises ne chercheraient-elles pas à n’embaucher uniquement la gent féminine ? Celle-ci, en plus de ses innombrables qualités, serait donc privilégiée sur le front de l’emploi car présenterait un coût moins important. Il est permis d’en douter. Or, le taux de chômage des femmes tend à se réduire, et dans le même temps, le pourcentage des femmes diplômées augmente, lui, très régulièrement, jusqu’à dépasser celui des hommes. Ainsi, 43,1 % des femmes en zone euro sont diplômées de l’enseignement supérieur, contre 33,6 % des hommes (sur la tranche d’âge similaire de 30 à 35 ans). En revanche, en France, comme dans le reste de l’Europe, force est de constater que le taux d’emploi des femmes est inférieur à celui des hommes (66,7 % contre 74,6 %). Enfin, en pourcentage de l’emploi total en France, les femmes sont 29,6 % à occuper un poste à temps partiel, pour 7,7 % des hommes.

« SI LA SITUATION SEMBLE S’AMÉLIORER, IL FAUDRA ATTENDRE ENVIRON 150 ANS, POUR ATTEINDRE L’ÉGALITÉ, LA VRAIE. »

En Allemagne, pays dont on vante les performances économiques et le quasi plein emploi, le taux d’activité des femmes est l’un des plus haut d’Europe… Avant le premier enfant. Par la suite, soit elles cessent leur activité jusqu’à l’entrée en maternelle du bambin, soit elles reprennent à temps partiel. Une situation induite par un défaut criant de structures d’accueil de la petite enfance, à laquelle souhaite pourtant remédier la chancelière Merkel. En Islande, le congé parental est partagé et les entreprises ne jouant pas le jeu de l’équité salariale sont soumises à des amendes qui peuvent être relativement élevées (et pas uniquement pour les grands groupes). Du chemin reste à parcourir pour parvenir à une juste égalité, qui serait pourtant vectrice d’une plus grande justice sociale. Aux femmes d’être actrices de leurs carrières, aux pouvoirs publiques d’impulser les politiques accompagnantes, et aux entreprises de refuser les écarts « non expliqués » de rémunération !

Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.fr

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