L’édito de Myriam Denis : « Dependance day »

par | 04 avril 2019

« Un chômeur sur cinq perçoit une indemnité supérieure à son salaire moyen antérieur. » Cette phrase de la ministre du Travail, Muriel Penicaud, a été reprise in extenso dans autant de médias que la France peut en compter.

Myriam DenisCette phrase a été prononcée au fil de son discours visant à présenter les intentions du gouvernement sur la réforme de l’assurance chômage, après que les maigres négociations syndicales aient échoué. Évidemment, elle a provoqué stupeur et indignation, mais n’était-ce point une volonté affichée ? Regardez, Messieurs-dames, tous ces demandeurs d’emploi, fainéants, bien sûr, oisifs et dépendants de notre système, qui gagnent bien davantage à ne rien faire chez eux, pendant que vous vous échinez à vous lever chaque matin remplir votre dur labeur ! Mais heureusement, le gouvernement veille au grain et va remettre de l’ordre dans ce système où les règles établies (et complexes, comme dans toute bonne doctrine française), peuvent permettre des situations où le travail s’avère moins rémunérateur que le chômage.

L’Unédic, cette association paritaire “chargée par délégation de service public de la gestion de l’assurance chômage en France”, soit, le pilote du dispositif d’indemnisation, s’émeut de la déclaration de la ministre. Pied au plancher, elle s’est empressée de fournir un document détaillé, expliquant que cette situation où un demandeur d’emploi toucherait davantage au chômage qu’en activité ne concernait “que” 4 % d’entre eux. Un argument contredit quelques jours plus tard par… Pôle Emploi.

« RIEN N’EST AUSSI SIMPLE QUE CE QU’AFFIRME MURIEL PENICAUD. ON NE SERAIT PAS AU PAYS DE LA COMPLEXIFICATION ADMINISTRATIVE À TOUS CRINS, SINON. »

Rétropédalage (dans la semoule), Pôle Emploi assure que la ministre avait bel et bien raison : 20 % des chômeurs bénéficieraient d’une allocation supérieure à leur salaire mensuel moyen. Mais, car il y a un “mais”, rien n’est aussi simple que ce qu’affirme Muriel Penicaud. On ne serait pas au pays de la complexification administrative à tous crins, sinon. Et c’est là où il faut bien suivre : ce genre de situation advient du fait du calcul à la française basé sur le nombre de jours travaillés. Vous divisez (pour mieux régner) la somme des revenus perçus sur les 12 derniers mois par le nombre de jours travaillés, et vous obtenez le salaire journalier de référence, servant de base pour le calcul de l’allocation mensuelle. Un procédé qui “bénéficie” aux personnes ayant des contrats fractionnés. Cela ne concerne donc que des personnes, qui touchent, de base, une faible indemnité. Pôle Emploi l’explique : « sur ces 600000 chômeurs, 16 % touchent une allocation de moins de 750 euros, 33 % entre 750 et 1 000 euros, 41 % entre 1000 et 1300 euros », et pour des périodes plus courtes. Pas de quoi sortir de la dépendance étatique et s’offrir des vacances aux Bahamas pendant que les autres vont bosser. Je ne pense vraiment pas que la majorité des gens qui n’ont plus d’emploi restent au chômage par choix. Cette situation est souvent vécue comme un véritable drame et vivre avec 1000 euros par mois ne ferait pas rêver grand monde. Mais bon, monter les gens les uns contre les autres permet de mieux faire passer les réformes en les rendant plus “populaires”. Cela permet aussi de camoufler les dés pipés de négociations syndicales n’ayant pas véritablement eu lieu.

Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.fr

L'optimisme patronal selon Faro

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