En guise d’édito, Myriam Denis nous communique sa lettre au Père Noël, dans laquelle elle rêve d’en finir avec le sexisme ordinaire.
Il faut s’y faire : on prépare dorénavant la rentrée en juin, Noël en octobre, dixit les grands magasins. Donc, je vous rédige ma liste, presque en retard. Car voilà : ma factrice est une femme d’une rare prévenance. Elle a gentiment collé sur ma boîte aux lettres un autocollant “stop pub”. Merci ! Me voilà enfin débarrassée des milliers de pages de publicité poussant au consumérisme exacerbé qui semble la norme dans notre société actuelle, et que j’exècre tant. Seulement voilà : ô drame, ô désespoir pour mes bambins : nous n’avons donc pas reçu les “précieux” catalogues de jouets, distribués… en automne. Heureusement, ma chère maman me connaissant bien – 37 ans qu’elle me pratique, ça aide – dans un louable souci d’anticipation, a pu en dénicher quelques exemplaires pour mes rejetons (pour la liste de cadeaux de maman, voir annexe III). Lesquels se sont jetés sur les pages colorées comme la faim sur le monde, feutres à la main, arborant leur sourire d’enfants sages (!), et cochant avec une attention soutenue tout ce que vous, cher père Noël, voudrez bien leur apporter le 25 décembre (cf. liste des enfants : annexe I).
« IL FAUDRAIT VRAIMENT BEAUCOUP DE MAGIE POUR PARVENIR À EXAUCER MON VŒU : QUE LE SEXISME ORDINAIRE SOIT BANNI À TOUT JAMAIS DE NOS SOCIÉTÉS. »
Seulement voilà : en haut de ma liste (liste complète de mes envies en annexe II), il y a quelque chose que seul vous, père Noël, pourrez accomplir dans votre grande mansuétude. Car il faudrait vraiment beaucoup de magie pour parvenir à exaucer mon vœu : que le sexisme ordinaire soit banni à tout jamais de nos sociétés, où le machisme est érigé en norme inaliénable et sacrée. Je voudrais que mes enfants grandissent dans un monde non clivant dès leur plus jeune âge, où toutes les opportunités d’avenir pourraient s’ouvrir devant eux, en fonction de leurs appétences et de leurs compétences. Je ne voudrais plus que les catalogues des grands magasins, cherchent à pousser ma petite fille de sept ans à faire “comme maman”, soit être une princesse (?), porter de grandes robes, faire la cuisine, pouponner ou encore s’adonner aux joies du repassage (il y a réellement un décalage entre les rêves du marketing et la réalité). Et mon petit garçon, du haut de ses presque cinq ans, poussé à “être un héros”, à s’intéresser exclusivement à la construction, aux voitures (qu’il affectionne), à vivre des aventures extraordinaires ou des métiers passionnants qui lui seraient réservées du fait de son genre.
Bien évidemment, tout ne peut pas être neutre, et les enfants ont tels ou tels centres d’intérêt. Mais si l’on installe l’idée, dans la tête des petites filles, que leur avenir se résume à pouponner et repasser, comment imaginer qu’elles puissent elles aussi, ambitionner de conquérir le monde ?
Voilà, cher père Noël, ce que j’appelle de mes vœux. Pour le reste, à votre dispo pour en discuter.
Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.fr
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