L'édito de Myriam Denis : "Rumour has it"

par | 03 mai 2018

Vous connaissez cette chanson d’Adèle ? C’est un titre que l’artiste a imaginé pour répondre aux rumeurs dont elle avait été victime eu égard à sa vie personnelle.

Myriam Denis
Les rumeurs, les médisances… Est-ce que l’on se rend toujours bien compte de la portée des mots et du mal que l’on peut faire en racontant des choses qui ne nous concernent pas – si possible en les déformant au passage ? Les rumeurs, les méchancetés de cet acabit… Les politiques de tous ordres connaissent la chanson. Je me souviens avoir évoqué ce sujet avec un ancien député de l’Ain, auquel il me répondit d’une manière très imagée : « La caravane passe, les chiens aboient ». Une façon de prendre de la distance, de se détacher des « on dit », tout en se rappelant sa probité et son honnêteté.
D’ailleurs, le journaliste, auteur et grand reporter Alexandre Duyck vient de consacrer un livre à ce phénomène, « La République des rumeurs », dans lequel il revient sur cette pratique hélas courante, notamment en politique.
Ce contenu évanescent et mensonger se diffuse souvent comme une traînée de poudre, jusqu’à exploser en éclaboussant plus ou moins de monde. Les cibles privilégiées ? Selon Alexandre Duyck, les personnalités ayant un potentiel médiatique et / politique, les entrepreneurs. Des personnes plus ou moins connues sur lesquelles il est « facile » de discourir à l’envi et sans preuve. Les rumeurs, impalpables et irrationnelles, s’insinuent partout, sournoisement et comme un poison.

« Il existe les rumeurs qui font juste du mal, lancées par jalousie, reprises par des crédules et relayées par des gourmands de sensationnel. »

Philippe Aldrin, dans sa Sociologie politique des rumeurs, considère qu’elles ont en général des durées de vie relativement courtes, le temps de salir et de faire mal, avant de s’évanouir dans la nature. L’ancienne ministre de l’Éducation sous François Hollande, Najat Vallaud-Belkacem, en a fait les frais à de nombreuses reprises. De la mise en doute de sa véritable identité (certains affirmant qu’elle se prénomme en réalité Claudine), jusqu’à sa soi-disant proposition d’instaurer une initiation à la langue arabe à l’école. La calomnie « permet » de jeter le discrédit, d’instaurer le doute, c’est une arme virale en politique. Sous couvert d’une certaine forme de plausibilité et de relais sur le terrain, c’est ainsi que les rumeurs peuvent s’épanouir. Surtout, leur point commun est la difficulté pour les personnes qui en sont victimes, à identifier la source de la calomnie.
Du simple bouche-à-oreille encore utilisé dans certains microcosmes locaux, on est passé à une autre dimension avec l’ère d’internet, terreau des fake news, des « infos » non vérifiées par les professionnels du journalisme. Mais parfois, on assiste, pour reprendre le terme du professeur de communication politique à l’université de Metz Arnaud Mercier, à un « blanchiment de l’information ». Ce phénomène est simple : une fausse info émerge sur un quelconque blog, avant d’être reprise in extenso par un journaliste qui n’aura pas pris la peine de la vérifier au préalable… Et l’effet boule de neige peut commencer.
Parfois, il y a du vrai dans la base d’une rumeur, il serait utopique de penser le contraire. Parfois cependant, cela tourne à la farce. Enfin, il existe les rumeurs qui font juste du mal, lancées par jalousie, reprises par des crédules et relayées par des gourmands de sensationnel. Selon Alexandre Duyck, pour « fonctionner », la rumeur doit être la plus grosse possible. Quitte à salir au passage des gens qui n’ont pourtant pas toujours grand-chose à se reprocher. « C’est toute la différence entre une affirmation et une information, décrit l’auteur. Tout le monde peut affirmer quelque chose. Informer… C’est différent. »

Myriam Denis
Rédactrice en chef
m.denis@eco-ain.frLes défilés de mai, par Faro

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