Immobilier : construire ou réhabiliter, telle est la question !

par | 17 octobre 2022

Compte tenu des enjeux environnementaux (bilans carbone, réglementations thermiques, DPE, etc.) et sociétaux actuels (pénurie de matériaux et de main d’œuvre, inflation, etc.), les promoteurs et maîtres d’ouvrage doivent s’interroger sur l’opportunité de rénover et de réutiliser des bâtiments existants ou de construire du neuf. La réponse s’accompagne d’un certain nombre de nuances avec des solutions à mettre en place au cas par cas.

Des deux côtés de la frontière franco-suisse les problématiques sont similaires : la forte croissance démographique annuelle nécessite de produire des logements et les villes disposent de nombreux locaux vacants et friches à requalifier. « Nous arrivons aux limites des surfaces d’assolement pour préserver des espaces agricoles selon les normes fédérales. Il faut construire là où c’est déjà possible », observe Romain Lavizzari, président de l’Association des promoteurs constructeurs genevois (APCG).

Injonctions paradoxales

« Les temps d’études sont beaucoup plus courts qu’avant, déplore pour sa part Olivier Aubert, président de la fédération du BTP de la Haute-Savoie. Or un chantier bien préparé est fait à 50 %. » Ce constat est partagé par l’ensemble de la filière en France, mais aussi en Suisse : « Plus un projet est bien pensé en amont et plus ses chances de succès sont grandes », soutient Nicolas Rufener. « Il y a de larges possibilités, mais pas facilitées par le carcan législatif », confirme Romain Lavizzari qui dénonce la complexité et la lourdeur des processus administratifs et juridiques.

« Les projets se rallongent du fait de la lenteur administrative, une certaine latence en amont. Du coup, il est demandé à la production de s’accélérer », approuve Olivier Aubert.Dès lors, pour chaque programme, il faut établir un diagnostic précis afin de définir les meilleures solutions au regard de l’urgence, des normes et de l’écocompatibilité des projets. « Sur les bâtiments plus anciens et plus solides, avec des matériaux plus pérennes, la réhabilitation est plus opportune », souligne Nicolas Rufener, secrétaire général de la Fédération du bâtiment de Genève, qui préconise dans tous les cas une approche globale.

« Les bâtiments anciens ne nécessitent pas forcément une lourde technologie comme la ventilation double-flux pour être performants thermiquement du fait de l’épaisseur des murs. Mais attention à bien conserver une ventilation naturelle », détaille-t-il.

La tendance est au recycling et des gros constructeurs mondiaux orientent leurs stratégies vers ces défis tels que Bouygues qui annonce que d’ici 2040, plus des trois-quarts de son business se feront dans la rénovation, date à laquelle le groupe vise une totale neutralité carbone.

Réemploi et recyclage

« Certaines constructions ont été réalisées avec une durée de vie relativement limitée », observe Nicolas Rufener, citant par exemple les programmes immobiliers des années cinquante, construits à la va-vite pour répondre à une urgence, mais dont la durée de vie est limitée. « Aujourd’hui, rénover, réhabiliter ces bâtiments à très grands frais n’est pas toujours très opportun », confirme-t-il. Des réhabilitations d’autant plus difficiles à envisager quand il s’agit de requalifications de locaux avec un changement de destination.

« Les transformations d’un bâtiment entier peuvent être lourdes quand il s’agit de réaffecter des locaux à un autre usage. La rénovation de l’existant avec la même destination est moins lourde à mettre en oeuvre », précise Romain Lavizzari. Les normes – thermiques, phoniques, sismiques… – ne sont plus les mêmes et le surcoût de ces projets dépasse largement ceux d’un programme neuf. « La construction a du sens dans bien des cas », résume Olivier Aubert qui pointe un des défis de la filière très grande productrice de déchets : le réemploi de matériaux.

La tendance est au recycling et des gros constructeurs mondiaux orientent leurs stratégies vers ces défis tels que Bouygues qui annonce que d’ici 2040, plus des trois-quarts de son business se feront dans la rénovation, date à laquelle le groupe vise une totale neutralité carbone. « Les bétons concassés servent par exemple à recréer des voiries », décrit-il. Il estime que les technologies numériques dont le BIM vont clairement pouvoir mener à bien cette mutation en profondeur du métier qui nécessite de prendre en compte l’ensemble du cycle de vie des bâtiments, de leur conception à leur destruction.

« Le réemploi suppose d’avoir une filière pour les collecter, les recycler, les valoriser », analyse Romain Lavizzari, conscient que les métiers du BTP sont à un carrefour et que la vraie question est : que veut-on pour l’habitat de demain ?


Sandra Molloy
Photo à la une : DepositPhotos


Cet article est issu de notre hors-série La Frontière en chiffres 2023, à retrouver au format liseuse en ligne ou au format papier.

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