Interview / Mike Horn : « Chacun peut soutenir la planète »

par | 04 mai 2019

« La planète, comme je la vois aujourd’hui, me fait peur mais elle est loin d’être finie »… Invité d’honneur du Salon du Climat mi-février à Lausanne, le célèbre aventurier de l’extrême appelle tout un chacun à « faire quelque chose pour changer notre terre ». Rencontre.

La poignée de main est ferme (très même !), l’homme chaleureux, accessible, disponible malgré une sur-sollicitation de chaque instant… Mike Horn est rare il est vrai et le croiser reste un privilège ! L’aventurier sud africain admet d’ailleurs ne pas être resté en Suisse (où il réside) plus d’une trentaine de jours sur ces cinq dernières années.

Trente ans que cet explorateur hors normes passe sa vie dehors, autour du globe (14 tours du monde à son actif !), défie les profondeurs de la jungle, se mesure aux plus hauts sommets de la planète, affronte les océans, brave les pôles…

« Si on rêve petit, on reste petit ! Croire que tu peux réussir change ta vie ».

Mike Horn

Autant dire que l’impact du réchauffement climatique, (et de l’homme !), sur le milieu naturel, ce spécialiste de la survie le voit et le vit au plus près depuis longtemps : « le changement va tellement vite dans les régions polaires par exemple qu’on ne sait plus comment l’arrêter ! », dit-il.

Il parle de l’érosion, qu’il constate avec inquiétude, du permafrost, ce sol dont la température se maintient en dessous de 0°C pendant plus de deux ans, de cette remontée des grizzlis vers les régions polaires, qui désormais s’attaquent aux ours blancs affamés et affaiblis, de cette glace qu’il est parfois obligé de parcourir en rampant et non plus en marchant car devenue trop fine… Il cite aussi ces avalanches de cailloux et ces tempêtes de neige de plus en plus fréquentes à très haute altitude…

Mike Horn, un témoin privilégié des impacts du réchauffement climatique. Photos 2 et 3 : les pôles, une de ses destinations de prédilection. Photo 4 : l’aventurier a déjà (entre autres) quatre 8000 mètres à son actif en Himalaya

La planète a la capacité de se reconstruire

« La planète, comme je la vois aujourd’hui, me fait peur mais elle est loin d’être finie. Elle a la capacité de se reconstruire mais il faut la soutenir et arrêter de regarder les frontières. On vit tous sur la même ! » Conscient depuis plusieurs années que la solution est dans l’éducation, il a, entre 2008 et 2012, embarqué des jeunes du monde entier sur son voilier pour « leur montrer » et les inciter « à protéger l’environnement ».

« Tout le monde peut être Mike Horn »

Il est aussi à l’origine de programmes d’application débouchant sur 400 projets pour la planète (plantations de six millions d’arbres en Amazonie, reconstruction de coraux à Bornéo…) et il préconise la création, en milieu scolaire, « d’équipes qui ont envie de s’investir pour la nature », à l’instar d’une équipe de sport. « Il faut donner un peu plus de pouvoir aux jeunes, ils ont de bonnes idées », dit-il.

Des jeunes qu’il inspire beaucoup et qui sont, à chacune de ses conférences, nombreux à venir l’écouter… « Si on rêve petit, on reste petit ! Croire que tu peux réussir change ta vie. Je suis quelqu’un de normal qui fait quelque chose d’extraordinaire et je m’en sers comme véhicule de communication. Chacun de nous peut faire quelque chose qui va changer notre terre demain. Tout le monde peut être Mike Horn ! »

Pour autant, lui qui a traversé avec son bateau le fameux 7e continent, cette immense masse de plastiques agglutinés au nord de Hawai, juge inutile de s’attaquer au nettoyage de cet océan. « Les plastiques amassés ici viennent de partout et nous en avons trouvé jusqu’à douze mètres de profondeur. Il faudrait au moins 150 ans pour nettoyer tout cela. Du coup, cela n’a pas de sens pour moi. »

Jouer un petit rôle partout où l’on est

Il préconise plutôt de mettre tout en oeuvre pour empêcher l’hémorragie de se poursuivre (« les technologies existent ») et de commencer par nettoyer autour de chez soi ; de jouer un petit rôle partout on l’on est, « ça, pour moi, c’est bien ». Pour autant, « les poissons mangent les plastiques, nous mangeons les poissons… On est en train de tuer notre nourriture ! Que va t’il se passer pour nous ? » Bonne question soulevée par celui qui ne se voit « ni ministre, ni politicien mais plutôt homme d’action ».

Entre 2008 et 2012, Mike Horn a embarqué des jeunes du monde entier sur son voilier pour les sensibiliser à l’environnement (ici en Nouvelle Zélande).

2019, une année chargée

En attendant, 2019 s’annonce une nouvelle fois dense pour Mike Horn. A peine son escale au Salon du Climat achevée qu’il a retrouvé son voilier brise-glace Pangaea à Honk-Hong, mis le cap sur le Japon, puis l’Alaska, avec la complicité d’Annika et Jessica, ses deux filles qui gèrent pour lui sponsors, communication… et qui partagent ponctuellement quelques moments privilégiés avec lui à l’autre bout du monde.

Au printemps, il va s’attaquer pour la troisième fois au K2, deuxième plus haut sommet du monde (8 611 mètres) situé à la frontière sino-pakistanaise, sommet qui viendrait compléter la liste des 8000 déjà à son actif : Gasherbrum I (8 068m) et Gasherbrum II (8 035m), Makalu (8 485m), BroadPeak (8 047m).

Puis, en août, il retrouvera la banquise. Il reprendra son expédition Pole2Pole, reliant du sud au nord les deux pôles. L’arrivée est prévue en fin d’année à Monaco (d’où il est parti pour la première partie de cette expédition en mai 2016)… Sans doute l’exploit le plus compliqué de sa vie !


Hélène Vermare

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