Hugues de Beaupuy : « Il reste une vingtaine d’années avant que le Pipa sature »

par | 11 mai 2022

Le directeur du Parc industriel de la Plaine de l’Ain quittera ses fonctions le 1er juillet après 20 ans de bons et loyaux services. Il a vécu de près l’essor d’un lieu devenu au fil des ans une sorte de ville à la campagne.

Vous avez succédé en 2001 au premier directeur du Pipa. Qu’est ce qui a changé en vingt ans ?

Le parc s’est rempli ! Il est passé de 60 entreprises à 188 et de 2 600 salariés à 8 200. La création de la pépinière d’entreprises en 2008 a changé l’idée de commercialisation du parc qui ne s’adressait plus uniquement aux grosses entreprises. Le développement des services à travers la création du Club des entreprises a aussi été une évolution. La structure a vécu deux événements essentiels avec la réforme des statuts en 2013, où il est passé de onze collectivités membres à quatre, et avec la réforme des statuts liés à la loi Notre en 2018, où il a changé les proportions de voix entre les quatre structures existantes.

Quelle est la typologie des entreprises ?

Ce sont pour la plupart des établissements industriels ou de logistique, mais pas des sièges sociaux. Nous n’avons pas de monstre en termes de taille, avec un site qui ferait trois mille emplois. Trois ou quatre usines ont entre 400 et 500 salariés, une douzaine d’autres entre 100 et 200, d’autres encore comptent une cinquantaine de personnes. Il existe ici une grande diversité. On parle souvent de la logistique, parce que c’est celle qui est la plus homogène, mais l’industrie a une diversité importante. J’entends dire que toutes vivent des tensions sur l’emploi. Mais l’emploi ici est toujours tendu. C’est un territoire qui se développe, où les créations de poste attirent les gens. Mais, il vaut mieux se trouver sur un territoire où l’emploi est tendu plutôt que le contraire. Nous avons une maladie de “riche”.

Vous recevez beaucoup de demandes d’installations ?

Nous réunissons six à sept comités par an où, à chaque fois, nous refusons quatre ou cinq demandes. Et ce nombre ne tient pas compte du propre fil que je reçois en amont. Toutes les candidatures ne sont pas présentées aux élus, sachant à l’avance qu’elles seront refusées. Nos premiers critères restent l’industrie et la diversité d’activités. Et puis, plus l’entreprise est alignée avec nos principes environnementaux, plus elle nous intéresse.

Comment commercialisez-vous les surfaces ?

Des porteurs d’affaires représentant tous les métiers de l’immobilier nous démarchent, mais aussi des structures publiques nationales, comme l’Aderly (l’Agence pour le développement économique de la région lyonnaise), ou internationales. Nous recevons aussi des sollicitations spontanées par internet. Une fois contactés, nous fournissons au client une présentation des sites en répondant à des questionnaires plus ou moins denses. Il m’est arrivé une fois de devoir répondre sous huit jours et en anglais à un questionnaire de 146 demandes. Ensuite, nous effectuons un premier tri des sites. Une visite des terrains et une présentation en salle viennent boucler cette première phase. Une fois d’accord, la délibération est présentée aux élus du conseil syndical, l’instance de gouvernance du Syndicat mixte qui regroupe en termes de voix la Région (46 %), la Communauté de communes de la Plaine de l’Ain (40 %), le Département (10 %) et la Métropole de Lyon (4 %). L’entreprise peut ensuite déposer son permis de construire et son autorisation d’exploiter. Quand tous les freins sont levés, rendez-vous chez le notaire pour la vente du terrain. En 45 ans, il s’est vendu en moyenne 10 ha par an. Nous ne faisons pas de location.

Quels sont les atouts du parc ? Qu’est-ce qui attire les entreprises ?

D’abord, ce sont les entreprises qui nous choisissent et non l’inverse, pour des raisons qui leur appartiennent. Ensuite, la localisation du parc, aux portes de Lyon, avec les infrastructures autoroutières, ferroviaires… que chacun connaît, est un bel atout. Les terrains aussi sont d’une très grande qualité : plats, reposant sur un lit de 15 mètres de graviers et une nappe d’eau enfouie à au moins huit mètres. Nous n’imposons pas de taille, mais une découpe sur mesure, à 50 €/m². Nous avons des infrastructures de qualité et bien entretenues sur lesquelles veille une équipe de treize employés. Restaurants, agences intérimaires, le lieu bénéficie enfin de multiples services, grâce aussi au Club des entreprises. Il y a une véritable culture du site, avec une appropriation par les gens. C’est devenu une adresse.

Combien de surfaces reste-t-il à commercialiser ? Quand arriverez-vous à saturation ?

Aujourd’hui, nous vendons 10 ha par an. Avec 240 ha restants, cela laisse encore une vingtaine d’années avant d’arriver à saturation. Au fur et à mesure, il reste de moins en moins de parcelles sans contrainte. La dernière ne conviendra peut-être pas tout de suite. Nous notons à la fois une pression plus forte et une offre en baisse. Nos possibilités d’agrandissement se situent du côté de Lagnieu, une commune déjà membre de la communauté de communes. Nous visons d’ici à cinq ans une centaine d’hectares dont nous sommes déjà propriétaires aux trois quarts.

Qu’en est-il des contraintes environnementales ?

Cela embête plus les industriels que nous, à cause des restrictions sur l’eau, par exemple. La difficulté pour nous, c’est la zéro artificialisation nette, dans le sens où l’on ne doit plus prendre de terrain à l’agriculture. Certes, le parc est déjà considéré comme industriel, mais si nous voulons l’agrandir, c’est plus compliqué.

Nous anticipons autant que possible la préservation de l’environnement. Le parc possède sa station gaz naturel pour les poids lourds et il a signé une promesse de vente pour l’installation d’une station hydrogène dédiée aux camions. Il y a aussi des hubs de vélos et des lignes de covoiturage rémunéré.

Combien coûte la gestion du parc ?

Son budget de fonctionnement s’élève à 2 M€ par an, financé par les contributions de ses quatre membres. Mais tant que la vente de terrains assure l’essentiel, cette contribution n’est pas sollicitée. Quant au budget d’investissement, qui permet de financer l’aménagement des routes, des voiries, etc., il s’élève à 2 à 3 M€ par an.

Question essentielle : comment allez-vous occuper votre retraite ?

Je vais laisser l’avenir m’emmener sur des chemins que je n’avais pas prévus. Rien de professionnel en tout cas. Je jouerai aux échecs en compétition et m’intéresserai un peu plus à l’ornithologie, mon autre passion. Mais cela laisse de la place à l’imprévu.


Bio express

  • 21 juin 1960 : Naissance à Bordeaux
  • 1982 : Deug de biologie
  • 1983 : Licence d’aménagement du territoire et maîtrise en 1985
  • 1986 : DESS de gestion des entreprises
  • 1989 : Il lance une chaîne d’épiceries fines à Paris
  • 1991 : Conseiller en développement économique en Ardèche
  • 1998 : Responsable de l’implantation d’entreprises à la Communauté urbaine de Lyon
  • 2001 : Directeur du Parc industriel de la Plaine de l’Ain

Eliseo Mucciante

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