S’agit-il d’une interprétation trop rigide de la loi ? Toujours est-il que la Communauté d’agglomération de Bourg-en-Bresse se voit reprocher de compter trop de femmes à sa tête.
Vouloir être proactif est parfois mal perçu par la loi. C’est l’expérience que vient de faire la communauté d’agglomération du bassin de Bourg-en-Bresse (CA3B), laquelle va probablement devoir s’acquitter de la “modique” somme de 90 000 euros. Son tort ? Avoir embauché trop de femmes dans son équipe de direction…
Une décision qui a logiquement fait bondir son président et maire socialiste de Bourg, Jean-François Debat. « Selon la loi, à partir du moment où l’on procède à cinq nominations de directeurs généraux ou de directeurs généraux adjoints, soit les plus hautes responsabilités au sein d’une collectivité comme la nôtre, ce collège doit comporter trois hommes et deux femmes, ou inversement. Or, à la CA3B, nous dénombrons quatre femmes sur ces postes, pour un homme », commente Jean-François Debat. La collectivité a conséquemment reçu un courrier du préfet de l’Ain, lui rappelant les obligations inhérentes à la loi Sauvadet. Celle-ci vise une montée en puissance de la parité, dans les nominations des postes de l’encadrement de la fonction publique. Mais point trop n’en faut…
Sanction
En effet, depuis 2017, les collectivités doivent respecter la règle des 60 % d’hommes ou de femmes sur cette typologie de postes. Mais pas plus. « Sinon, la collectivité est redevable d’une amende administrative d’un montant de 90 000 euros, ce qui est demandé à la CA3B, renchérit Jean-François Debat. J’ai réagi, car je considère que cette amende n’est pas justifiée. »
L’objectif de la loi ?
Le président de la communauté d’agglomération rappelle « l’objectif réel de la loi » : pour lui, le but n’est pas tant d’ambitionner la parité parfaite au niveau d’une collectivité, que de tendre vers un meilleur équilibre global et ce, au niveau national sur ces postes de hautes responsabilités.
« L’idée est de faire en sorte que davantage de femmes accèdent à ces postes. Je trouve donc paradoxal et incompréhensible que la communauté d’agglomération soit sanctionnée, alors qu’au niveau national, et même si les choses ont tendance à s’améliorer, ces postes sont occupés, en moyenne, à 70 % par des hommes ! » La ville de Lille a également été concernée par ce genre d’amende. À l’inverse, seize collectivités, dont l’effectif décisionnaire était essentiellement masculin, ont été sanctionnées au titre de cette loi.
Recours
Le président de l’intercommunalité aindinoise a donc formulé un recours hiérarchique, lundi 2 septembre, auprès de Marlène Schiappa, ministre chargée de l’Égalité Hommes-Femmes, et de Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur… Et, à l’heure où nous mettons sous presse, il est en attente d’une réponse.
« Je ne leur demande pas de trouver un bidouillage pour que la collectivité ne paie pas, mais de sortir par le haut de cette histoire et d’améliorer le texte de loi, d’affiner l’interprétation de la loi. Ainsi, on pourrait envisager une chose simple : tant qu’au niveau national, nous ne sommes pas parvenus à un meilleur équilibre, on ne sanctionnerait pas les collectivités qui compteraient “trop” de femmes, partant du principe qu’il s’agit d’une modeste compensation tout à fait acceptable. » En espérant faire jurisprudence…
Les nominations en cause
Les quatre nominations en cause au sein de la CA3B ne sont pas de nouvelles nominations à proprement parler, mais des fonctions inhérentes à la création de la nouvelle Communauté d’agglomération de Bourg-en-Bresse. Celle-ci a vu le jour en 2017, et regroupe 74 communes pour 140 00 habitants.
Par Myriam Denis
Cet article est paru dans le magazine ECO de l’Ain du 5 septembre 2019. Pour retrouver l’intégralité des articles de notre hebdomadaire, mais aussi de nos suppléments et hors-séries, c’est ICI.
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