Stations de ski : « Il faut sauver les vacances de février »

par | 15 janvier 2021

La fermeture prolongée des remontées mécaniques met en péril les stations de ski. Une saison blanche, tant redoutée, les anéantirait.

Note : cet article a été rédigé avant les annonces gouvernementales du 14 janvier.

Alors que la saison de ski a démarré il y a plus d’un mois, l’ouverture des remontées mécaniques n’en finit pas d’être reportée. Au grand dam des acteurs économiques de la montagne, qui ne décolèrent pas. Le Conseil de défense ayant décidé de ne pas rouvrir les remontées le 7 janvier, comme attendu, les professionnels devront patienter à nouveau jusqu’au 20 janvier pour connaître le sort qui leur sera réservé. Après avoir perdu 1,6 milliard d’euros à Noël en Savoie Mont-Blanc, et plus encore à l’échelle de la montagne française, ils doivent tirer un trait sur janvier. À force de tergiversations, tous redoutent une saison blanche 2020-2021, mais prient pour une réouverture début février.

Le 20 janvier sinon rien

Car faire l’impasse sur les vacances d’hiver, qui représentent 30 à 40 % de leur activité, est tout simplement inimaginable. « Il y a urgence. Si nous n’ouvrons pas, les stations et les socioprofessionnels vont mourir. On est en train de tuer le modèle économique que nous avons mis soixante ans à mettre en place depuis le dernier plan Neige (et qui fonctionne !), avec de fausses idées et de fausses annonces », réagit vivement Jean-Luc Boch, président de France Montagnes et de l’ANMSM (Association nationale des maires des stations de montagne). Et l’élu, également maire de La Plagne-Tarentaise, de pointer aussi les annulations en cascade, faute de visibilité.

« À trois semaines des vacances d’hiver, chaque jour compte. Ne serait-ce que pour relancer les réservations. Et quand bien même, il faut du temps pour rouvrir une station, battre le rappel des saisonniers… », alerte le président de Domaines skiables de France, Alexandre Maulin, ajoutant : « La crise a démontré que sans le ski (alpin), tout est fini. Nous devons absolument rouvrir pour éviter une crise systémique dans les vallées. » Il anticipe déjà une forte baisse de l’activité sur cette période, en l’absence de la clientèle étrangère.

Des stations quasi à l’arrêt

D’ailleurs, il n’y a qu’à se rappeler la chute des taux d’occupation enregistrés pendant les vacances de fin d’année en Savoie Mont-Blanc, soit 19 % à Noël (-59 points) et 29 % pour le Nouvel An (-63 points). Seulement 20 % des hôtels sont ouverts actuellement (cf. encadré). Et encore, tout dépend des stations. En altitude, ils se comptent sur les doigts de la main. À Val Thorens, les établissements qui sont de gros porteurs sont restés porte close. À l’instar des hôtels haut de gamme et luxe des stations alpines chic comme Courchevel et Val d’Isère, privés de leurs restaurants mais aussi de leurs fidèles clients étrangers.

Quant aux résidences de tourisme, la plupart des opérateurs fonctionnent a minima – et plutôt dans les stations villages, où les activités nordiques abondent –, pour sauver les meubles. Le groupe Pierre & Vacances Center Parcs, leader de l’hébergement touristique, qui avait ouvert le 18 décembre neuf résidences de tourisme (dont Arc 1850, Avoriaz, La Plagne, Chamonix et Megève) sur les 65 qui le sont habituellement à cette période, a décidé de fermer en janvier, la clientèle étrangère faisant défaut.

« Un sondage réalisé auprès de nos clients ayant réservé à Noël montre que 70 % d’entre eux préfèrent annuler ou reporter leur séjour en l’absence de remontées mécaniques », argue la responsable communication du groupe, Valérie Lauthier. Avec, toutefois, la ferme intention de rouvrir toutes les résidences dès que le gouvernement aura donné le feu vert aux domaines skiables. De son côté, Odalys, autre gros hébergeur, a mis en service 15 résidences et 80 chalets sur 150.

Résidence prestige Edenarc, exploitée par Odalys, aux Arcs. À la demande du Syndicat national des résidences de tourisme (SNRT), les résidences de tourisme et villages vacances, qui ne bénéficiaient pas du fonds de solidarité, devraient recevoir un coup de pouce de l’État.

Tandis que MMV, spécialiste des vacances club à la montagne avec 18 hôtels et résidences, a fait le choix de rester fermé, « à cause de l’annonce tardive de l’ouverture administrative des établissements (le 15 décembre) et de la fermeture de nos espaces de restauration », précise Bruno Clément, le directeur général adjoint du groupe. Tous les professionnels du secteur attendent une décision ferme et définitive de l’exécutif mercredi et se disent sur le pied de guerre pour ouvrir dès que possible.

Plus d’aides pour l’hôtellerie-restauration

Le plan Montagne expressément réclamé par le GNI pour soutenir les hôteliers- restaurateurs vient de porter en partie ses fruits. Bruno Le Maire a annoncé mardi que « le fonds de solidarité (allait) financer, dès janvier, les charges fixes des grandes structures du secteur, jusqu’à 3 millions d’euros en cumulé sur toute la période de crise (au lieu de 800 000 euros, soit 20 % du CA) ».

En pleines négociations, l’organisation syndicale demande aussi un délai supplémentaire d’un an pour rembourser le PGE mais aussi les autres prêts bancaires, « afin de ne pas creuser davantage le déficit des entreprises, qui accuseront 30 à 40 % de perte fin janvier », insiste Paul Duverger, président du GNI Rhône-Alpes Régions Est. Dernière revendication : le montant des aides doit couvrir les revenus des dirigeants.

Focus : Les magasins réclament le soutien de l’État

Impactés, les commerçants, comme leurs fournisseurs, affichent des chiffres d’affaires proches de zéro. Pour calmer les acteurs du secteur, l’État a accordé un plan d’aides de 400 millions d’euros. Initialement exclus en partie de ces mesures, les commerces de sport employant plus de 50 salariés sont désormais éligibles. « Mais cela ne suffit pas. Le seuil du fonds de solidarité lié au plan Tourisme doit être plafonné à un million d’euros par mois, et non à 200 000 euros, et sur toute la saison pour être toujours debout le 15 décembre 2021 », martèle David Giraud, président du groupe Skishop, basé à Tours-en- Savoie, qui demande la couverture de ses charges fixes et le report d’une année des remboursements d’emprunts.

Ce magasin Skishop (adhérent Skiset et Netski) à Arc 1800 est fermé depuis le 2 janvier, en l’absence de vacanciers.

« Le gouvernement doit tenir compte de notre saisonnalité, quand nous avons cinq mois d’activité pour couvrir douze mois de charges. » Comme beaucoup, le dirigeant a vu son chiffre d’affaires plonger de 95 %. À Noël, il n’a ouvert que six de ses 39 magasins en Haute-Tarentaise et embauché 38 % de ses 250 salariés. En janvier, tous ses magasins sont fermés dans l’attente d’une hypothétique ouverture des domaines skiables.

« Et quand bien même, nous savons déjà qu’en ouvrant du 1er février au 30 avril, nous réaliserons environ 40 % de notre activité, par conséquent une baisse a minima de 60 % sur la saison qui se cumulera à celle de 25 % de l’hiver dernier », soupire-t-il.

La filière outdoor sinistrée

Une situation catastrophique qui s’étend à la filière des sports outdoor. Selon l’Union sport & cycle, les carnets de commandes des marques de textile et matériel ont diminué de 40 %, après les annulations et reports, au dernier trimestre 2020. Et leur sort sera scellé au printemps « lorsque les capacités d’investissement de leurs clients commerçants seront très limitées, faute d’activité », anticipe Morgan Redouin, président de la commission Montagne de l’union, regroupant 1 400 adhérents. Reste aux détaillants à trouver des solutions avec leurs fournisseurs afin d’étaler les délais de paiement. « Pour que les marchandises ne perdent pas en valeur et que les magasins puissent conserver leurs marges, certaines marques ont déjà consenti à reconduire leurs collections 2020-2021 l’hiver prochain. »

Les dernières annonces gouvernementales du 14 janvier 2021

Zoom sur les aides supplémentaires annoncées par Bruno Le Maire à 49.10min :


Par Patricia Rey


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